lundi, novembre 06, 2006

N° 224 - Journal d'Irak Special dossier - 06/11

Sommaire :
Les condamnations prononcées contre Saddam Hussein et ses sept coaccusés.
1 Médias
1-1 Liz Smith : Assassinat d'un journaliste anglais par l'armée US en 2003..
2 Les Brèves.
2-1 Point de vue de l’Associated Press : Les Etats-Unis avaient prévu les difficultés d'une invasion de l'Irak dès 1999 dans un jeu d'anticipation.
3 Dossier & Point de vue.
3-1 Carlos Varea, Pedro Rojo et Houmad El Kadiri, : Le Commandement Politique Unifié de la Résistance Irakienne est né.
3-2 Point de vue de Alain Joxe : l’unilatéralisme impérial et les guerres asymétriques.
3-3 Attaque du camp Falcon par la Résistance Irakienne : Explosions d'armes à l'UA, et ou d'armes nucléaires tactiques ?
3-4 Point de vue de James Cogan et Peter Symonds : Tensions entre les gouvernements des Etats-Unis et de l’Irak ont encore augmenté.
3-5 Point de vue de Joe Kay : Plusieurs rapports font état de préparatifs d’un coup d'état en Irak.
3-6 Point de vue de James Cogan.: Revirement tactique de la politique US.
4 Courrier des lecteurs & trouvé sur le net.
4-1 Dossier de Annick Cojean : "Soldat ! Tu iras en Irak".
Les condamnations prononcées contre Saddam Hussein et ses sept coaccusés.
Irak: Saddam Hussein condamné a mort.
05-11
Un tribunal irakien a condamné a mort Saddam Hussein visiblement ému par la sentence mais toujours prêt à prendre la parole : "Longue vie à l'Irak" alors qu'on l'emmenait hors de la salle d'audience."Ne me tordez pas les bras", a répété par deux fois à ses gardes l'ancien président,.
Peu après le début de l'audience, le ‘juge’ a expulsé de la salle l'avocat américain de Saddam Hussein, l'ancien ministre de la Justice Ramsey Clark."Sortez de la salle, vous êtes venu d'Amérique pour vous moquer du tribunal", a lancé le juge(..). L'avocat américain avait critiqué l'annonce du verdict, à deux jours des élections parlementaires américaines du 7 novembre.L'audience a duré moins de 40 minutes et clôture un procès qui s'est tenu du 19 octobre 2005 au 27 juillet 2006.
Le juge Raëd Jouhi, du Haut tribunal pénal à déclare en final : "L'appel contre le verdict démarre demain (lundi) et va durer 30 jours"
Réaction du perroquet irakien.
Ce verdict "marque la fin d'une période noire", a déclaré le Premier ministre al-Maliki, "Le verdict rend justice aux familles de Doujaïl et à toutes celles qui ont subi l'injustice du dictateur.
Réaction libre :
"La condamnation à la pendaison de l'ancien président fait partie du complot américain. Saddam Hussein était un symbole de la libération de l'Irak", juge le Dr. Mouzahim Allaoui, professeur d'université. "Le verdict avait été préparé de longue date à Washington et à Tel-Aviv", renchérit Qoussaï Addai, fonctionnaire.
"Saddam a dit un jour devant le tribunal qu'il était un combattant, un combattant du parti, et c'est ainsi qu'il restera pour nous", assure Hadi Ali, originaire du village de Ouja, le lieu de naissance de l'ancien président.
Dans le monde :
La Maison Blanche s'est félicitée dimanche de la condamnation à mort prononcée contre l'ancien président irakien Saddam HusseinLa russie s'est nettement démarqué en mettant en garde contre les "conséquences catastrophiques" qu'aurait pour l'Irak la pendaison de Saddam Hussein, qui "divisera encore un peu plus la société irakienne (car) les sunnites ne reconnaîtront pas cette sentence".Les Européens faisaient état de leur réticence face à la peine capitale, et que les défenseurs des droits de l'homme soulignaient les lacunes du procès.UK : "Je salue le fait que Saddam Hussein et les autres accusés ont été présentés devant la justice et ont eu à rendre compte de leurs crimes", a déclaré le ministre des Affaires étrangères M.Beckett.Dans le reste de l'Europe, l'approbation était plus modérée, et surtout tempérée par le rejet de la peine de mort.
La présidence finlandaise de l'Union européenne a d'ailleurs répété cette position officielle de l'Europe, et appelé l'Irak à ne pas appliquer les peines prononcées dimanche.La France a dit "prendre acte de la sentence prise par la justice irakienne", tout en rappelant sa position pour l'abolition de la peine de mort, et a "espéré" que l'annonce du verdict n'entraînerait "pas de nouvelles tensions" en Irak.Le haut commissaire de l'ONU chargé des droits de l'homme, Louise Arbour, a de son côté appelé dimanche le gouvernement irakien à observer un moratoire sur l'exécution pour permettre à toutes les procédures d'appel d'avoir lieu.L'organisation de défense des droits de l'homme Amnesty International est allée quant à elle beaucoup plus loin, jugeant que le procès avait été "une affaire glauque, marquée par de graves failles qui remettent en question la capacité du tribunal, tel qu'il est établi actuellement, à administrer une justice juste, en conformité avec les normes internationales".Human Rights Watch (HRW) a également estimé que ce procès était "une occasion ratée de donner un sens à la règle de droit" et de rendre véritablement justice aux victimes, ayant échoué à établir réellement les faits avec des preuves indiscutables.La Chine, par refus "d'ingérence dans une affaire intérieure irakienne", se sont refusés à tout commentaire.(avec Afp)
05-11
Voici les peines infligées par le Haut tribunal pénal irakien aux huit accusés qui comparaissaient à Bagdad pour le massacre de 148 chiites à Doujaïl en 1982.
-- Saddam Hussein, ancien président de l'Irak, condamné à la mort par pendaison.
-- Barzan Ibrahim, demi-frère de Saddam Hussein et chef des services de renseignement irakiens à l'époque du massacre, condamné à la mort par pendaison.
-- Awad Hamed al-Bandar, ancien chef du tribunal révolutionnaire irakien, condamné à la mort par pendaison.
-- Taha Yassin Ramadan, ancien vice-président irakien, condamné à l'emprisonnement à perpétuité.
-- Abdullah Kazim Ruwayyid, ancien responsable du parti Baas, condamné à 15 ans d'emprisonnement.
-- Mizhar Abdullah Ruwayyid, ancien responsable du parti Baas, condamné à 15 ans d'emprisonnement.
-- Ali Dayih Ali, ancien responsable du parti Baas, condamné à 15 ans d'emprisonnement.
-- Mohammed Azawi Ali, ancien responsable du parti Baas, reconnu non-coupable et relâché.
La peine de mort et la prison à vie donnent lieu à des appels automatiques qui reporteront l'exécution du verdict de plusieurs mois au moins.
Saddam Hussein a souhaité faire face à un peloton d'exécution plutôt que d'être pendu.
AP dimanche 5 novembre 2006, 11h02
1 Médias
Ndlr : PS : la publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage les analyses ou point de vue des auteurs, mais doit être vu comme information
Marc
1-1 Liz Smith : Assassinat d'un journaliste anglais par l'armée US en 2003
Vous allez voir que l'on en apprendra bien d'autres d'ici peu.
Au pays du menteur Bush, il est bien évident que la Vérité ne doit pas se savoir ni en Irak, ni en Afghanistan, ni partout ailleurs... les journalistes non serviles à l'armée sont systématiquement empêchés de faire leur travail d'information ou éradiqué. On critique Hitler et son ministre de la propagande, l'infect Goebbels, mais finalement on assiste à la même chose. Un état fasciste impose le fascisme au monde entier. Peuples du monde, libérons nous de cette férule ! Faisons la chasse aux Occupants et libérons nos frères !On ne peut plus continuer à vivre dans un monde où l'on nous impose l'intolérable. Nous n'avons pas élu Bush et sa clique de malfaisants. Le monde serait bien plus peinard sans eux.
Adriana Evangelizt
Liz Smith : Grande-Bretagne: le tribunal déclare que le journaliste d’ITN, Terry Lloyd, a été assassiné par les forces américaines
Le coroner (juge spécialisé) du comté d’Oxfordshire a déclaré vendredi 13 octobre que le journaliste de la chaîne de télévision privée britannique ITN, Terry Lloyd, avait été abattu illégalement par les forces américaines en mars 2003 dans le sud de l’Irak. Après une enquête qui a duré six jours, le coroner adjoint, Andrew Walker, a dit à la cour, « après avoir minutieusement examiné l’ensemble des preuves, je peux dire avec certitude que si ce meurtre relevait de la loi anglaise, il aurait constitué un homicide illégal… Je vais écrire au plus haut magistrat de Grande-Bretagne et au procureur général en vue de prendre les mesures nécessaires pour poursuivre en justice les personnes impliquées dans cette affaire. » Walker a insisté, « je n’ai aucun doute sur le fait que M. Lloyd a été tué par une balle traçante tirée par un fusil américain. » Lloyd, tout comme son interprète libanais, Hussein Osman, le caméraman français Fred Nérac et le caméraman belge, Daniel Demoustier, furent parmi les premiers journalistes non-« embedded » (non intégrés aux forces américaines) à être entrés dans le sud de l’Irak. Avant cela, les uniques reportages en provenance des médias occidentaux étaient des reportages revus et corrigés venant de journalistes incorporés dans des unités américaines et britanniques. Comme la cour l’a entendu à maintes reprises durant la semaine, Lloyd n’était pas un preneur de risques, mais un professionnel averti et compétent. Au moment de sa mort, il travaillait depuis vingt ans pour ITN et était l’un de leurs journalistes les plus expérimentés ayant couvert des conflits aux quatre coins du monde. Le 22 mars 2003, l’équipe de Lloyd s’était rendue à Basra pour interviewer des civils afin de recueillir leurs sentiments sur la guerre. L’équipe a été prise dans un échange de tirs entre les forces américaines et irakiennes près du pont de Shatt Al Basra. Lloyd et Osman ont été tués et Nérac, toujours porté disparu, est présumé mort. Demoustier qui a survécu à l’incident a dit aux enquêteurs que la voiture de l’équipe se dirigeait vers le pont « en circulant parmi d’autres voitures civiles quand ils ont vu des troupes irakiennes s’approcher d’eux et faire demi-tour. » Il a dit que la voiture du deuxième convoi dans laquelle se trouvaient Lloyd et Osman avait été arrêtée par un véhicule militaire irakien. Il a alors vu un véhicule militaire irakien s’arrêter près de lui et les soldats se trouvant à l’intérieur leur faire un signe avec le pouce tourné vers le haut. Demoustier a expliqué : « Au même moment, les tirs ont commencé. Ils venaient de loin. Je me suis immédiatement jeté sous le volant. Puis ça a été infernal. Les tirs des mitrailleuses visaient directement ma voiture. J’étais absolument sûr de mourir, j’étais cent pour cent sûr de mourir. J’ai tourné la tête vers la droite et j’ai vu que la portière passager était ouverte et que Terry n’était pas dans la voiture. » Demoustier a dit au tribunal qu’il avait regardé en l’air et vu que le toit de la voiture était en feu, des bidons d’essence qu’ils transportaient s’étaient enflammés. Demoustier s’était alors jeté hors de la voiture juste avant que la voiture n’explose. Il a décrit comment il était resté couché dans le sable et la boue pendant une bonne demi-heure avant d’essayer de se relever. Il s’était retourné en quête de ses collègues et avait vu la deuxième voiture d’ITN en stationnement avec les portières ouvertes. Leurs voitures qui étaient clairement identifiées « Presse » avaient été frappées par des tirs de tanks américains : « Il n’y a aucun doute que la majorité des balles venaient de tanks américains. » Lloyd avait été sérieusement, mais pas mortellement blessé et fut transporté dans une ambulance de fortune. Mais ce véhicule avait alors essuyé les tirs des forces américaines et il fut tué. Au cours de l’enquête, une séquence vidéo relatant l’incident fut montrée en public pour la première fois. Elle avait été tournée par un caméraman intégré à la division de tanks qui aurait tiré sur le convoi de Lloyd ; la séquence avait été remise à la police militaire royale par les autorités américaines quelques mois plus tard. Le commandant Kay Roberts de la police militaire royale a dit que les autorités américaines leur avaient dit que la séquence vidéo qu’elles leur avaient transmise était « tout ce qu’ils avaient ». Toutefois, un expert lui avait dit qu’« au début de l’enregistrement, les références de temps sautent d’environ quinze minutes. » La vidéo commence alors avec des prises de vue des voitures carbonisées de l’équipe. Roberts a dit à la cour que des soldats irakiens avaient emmené Nérac et Osman alors qu’ils se dirigeaient vers Basra et qu’ils les avaient transférés dans une camionnette irakienne. « Peu de temps après avoir chargé les deux hommes, le véhicule avait essuyé des tirs continus et explosé. Aucun des deux témoins ne se souvenait des événements qui avaient suivi l’explosion qui les avait éjectés du véhicule. » La séquence montre la voiture en feu dans laquelle Demoustier et Lloyd avaient voyagé et la deuxième voiture portant le sigle ITN. On peut entendre des cris « C’est la presse, ici c’est la presse ». Le deuxième clip vidéo montre des Irakiens qui passent en camionnette et des soldats américains qui crient, « contrôlez les véhicules, contrôlez les véhicules. Vous devez arrêter ces véhicules pour vérifier s’il y a des armes. » Ceci montre que les soldats américains ne disposaient pas de suffisamment d’information, car ils n’avaient pas vérifié s’il y avait ou non des armes, néanmoins ils avaient tiré sur les véhicules au lieu de tirer au-dessus. L’expert en balistique, le docteur Thomas Warlow, a dit que Lloyd avait d’abord été touché par une balle irakienne tirée de la camionnette et qu’il aurait pu survivre à cette blessure si des soins médicaux avaient été pratiqués. Il avait ensuite été touché à la tête par une balle américaine au moment où on l’emmenait dans le minibus civil pour lui prodiguer des soins, et c’est ce qui l’avait tué sur le coup. Warlow a précisé que « si le véhicule avait été perçu comme une menace il aurait subi des tirs avant d’avoir fait demi-tour. Ce qui aurait provoqué des dégâts sur le devant du véhicule. Je suis sûr que c’est le fait que le véhicule se soit arrêté pour emmener des survivants qui a incité les Américains à tirer sur ce véhicule. » Dès le début, les collègues de Lloyd à ITN ont mené leur propre enquête pour découvrir la vérité sur sa mort. L’ancien directeur général d’ITN, Stewart Purvis, a dit à la cour qu’il y avait eu si peu d’informations fournies sur l’incident qu’ITN avait été obligé d’envoyer deux de ses propres journalistes à Basra pour enquêter. ITN avait adressé de « nombreuses demandes » au ministre de la Défense de l’époque, Jack Straw, sur ce qui s’était passé, mais n’avait reçu que des informations limitées : « J’en ai conclu que les éléments de haut niveau de l’armée britannique en savaient plus sur ce qui s’était passé qu’ils ne voulaient bien nous révéler. » Purvis a expliqué que l’armée américaine ne reconnaissait pas les journalistes qui n’étaient pas intégrés dans leurs troupes et, de ce fait, déclinait toute responsabilité pour les « unilaterals » (journalistes indépendants). C’en était même « au point où, dans un sens, ils ne reconnaissaient pas leur existence. » Purvis dit à la cour qu’il avait parlé aux militaires des projets de voyage de son équipe de journalistes mais qu’il n’avait reçu aucune information concernant les mouvements de troupes. « Ils n’étaient pas disposés à dialoguer, et donc je ne sais pas ce qui aurait pu être fait de plus. Nous ne pouvions pas forcer les militaires à nous communiquer les mouvements de troupes pour les transmettre à nos correspondants de guerre. » Angela Frier, directrice générale d’ITN, a parlé des efforts qu’elle avait entrepris pour savoir ce qui s’était passé et de la bataille qu’elle avait menée pour retrouver les corps de ses collègues décédés. Après que Demoustier lui ait dit ce qui s’était passé, elle fit appel à la Croix Rouge pour identifier le corps de Lloyd et le faire transporter au Koweït quelques jours après le meurtre et aussi pour fouiller les hôpitaux de Basra à la recherche des traces d’Osman et de Nérac. Mais, entre-temps la situation qui régnait à Basra était devenue chaotique. « Ce jour là, 25 personnes avaient été tuées et 70 personnes avaient été admises à l’hôpital central de Basra », dit-elle. Elle avait demandé à l’armée britannique de balayer la route sur laquelle l’équipe de Lloyd avait été attaquée pour rechercher les corps, mais on lui avait dit qu’elle était sous contrôle de l’armée américaine. Le lendemain, elle était passée sous contrôle britannique vu que les forces américaines remontaient vers le nord, mais l’armée britannique avait refusé de faire des recherches, malgré des appels quotidiens lancés, tant qu’elle ne recevrait pas « une demande formelle de Londres », qui ne vint jamais. Johnathen Munro, le directeur du service d’information d’ITN, a dit que les forces britanniques pouvaient non seulement se montrer très peu serviables, mais pouvaient parfois être « obstructives. » Cette préoccupation était partagée par des collègues d’autres réseaux et leurs opinions furent communiquées au ministère de la Défense. Le coroner adjoint a dit qu’on n’avait pas tenu compte des preuves fournies par les soldats américains parce que les autorités américaines avaient refusé que des soldats qui avaient témoigné soient nommés ou participent à l’enquête. Walker a dit qu’il ne serait pas pertinent d’accepter les témoignages des soldats sans les soumettre à un contre-interrogatoire. Toujours est-il, qu’il y a de sérieux doutes quant à l’exactitude de leurs déclarations. Anthony Hudson qui représente la famille de Lloyd a expliqué qu’il était possible qu’ils ne soient pas venus de peur de risquer eux-mêmes d’être poursuivis pour crime de guerre en application de la Convention de Genève. Daniel Friedman, représentant ITN, a déclaré au coroner que l’armée américaine avait attendu jusqu’au 19 avril pour recueillir les témoignages des soldats, soit quatre semaines après la mort de Lloyd. Il a également dit à la cour que, le même jour, l’armée américaine avait écrit à l’épouse de Nérac pour nier toute implication des forces américaines. Les preuves présentées à la cour du coroner montrent que toute personne cherchant à faire un reportage indépendant de la guerre en Irak aurait connu le même sort que Lloyd. Des représentants de l’armée britannique ont clairement exprimé l’opinion que si des journalistes ne s’intégraient pas aux unités de l’armée, alors l’armée se déchargerait de toute responsabilité pour ce qui adviendrait. Comme l’a dit Purvis, « Selon mon expérience, les armées britannique et américaine ne veulent pas d’équipes de journalistes indépendants (« unilaterals »), un point c’est tout. » Après le jugement, les deux chefs des services de collecte des informations électroniques (news-gathering) d’ITN et de la BBC ont insisté sur le droit des médias à traiter des conflits de façon indépendante. Tout au long de ces trois dernières années, la famille Lloyd et le syndicat national des journalistes britanniques (NUJ) ont présenté maintes requêtes réclamant la réouverture de l’enquête. La famille n’a jamais reçu de lettre expliquant la raison du retard. La veuve de Lloyd, Lyn a déclaré dans un communiqué, « Ceci est un crime de guerre très grave. Comment pourrait-on interpréter autrement le mitraillage d’un véhicule dans de telles circonstances ? Il ne s’agissait pas d’un incident impliquant des tirs de son propre camp ou de tirs croisés, c’était un acte méprisable, délibéré, vindicatif et ce d’autant plus qu’il s’est produit de nombreuses minutes après l’échange initial. « Les forces américaines semblent avoir permis à leurs soldats de se comporter comme des cowboys fous furieux dans un endroit où circulaient des civils. » La fille de Lloyd, Chelsey a dit, « La mort de mon père semblerait n’être rien moins qu’un meurtre, ce qui est profondément choquant. » L’éventualité de poursuivre quelqu’un en justice pour le meurtre de Lloyd paraît être très improbable. Mais même la poursuite des soldats impliqués laisserait les coupables impunis. Le meurtre de Terry Lloyd et le ciblage d’autres journalistes tels le personnel d’Al-Jazira était une politique délibérée pour laquelle les gradés de l’armée américaine et le gouvernement Bush doivent rendre des comptes. Sources WSWS Assassinat d'un journaliste anglais par l'armée US en 2003
Posté par Adriana Evangelizt
Liz Smith Mercredi 01 Novembre 2006
2 Les brèves
Ndlr : PS : la publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage les analyses ou point de vue des auteurs, mais doit être vu comme information
Marc
2-1 Point de vue de l’Associated Press : Les Etats-Unis avaient prévu les difficultés d'une invasion de l'Irak dès 1999 dans un jeu d'anticipation.
Le gouvernement américain a conduit dès 1999 une série secrète de jeux de guerre qui lui avait permis d'estimer qu'une invasion de l'Irak nécessiterait 400.000 soldats, sans garantie d'éviter le chaos, selon des documents rendus publics samedi.
Quelque 70 dirigeants militaires, du renseignement ou diplomates ont participé à ces jeux, baptisé "Desert Crossing", et devaient évaluer le nombre maximal de soldats qu'il serait nécessaire d'envoyer pour assurer l'ordre, fermer les frontières et subvenir aux autres besoins en matière de sécurité.
Les documents relatant ces jeux d'anticipation ont été rendus publics samedi à la suite d'une requête des Archives de la sécurité nationale de l'Université George Washington, un institut de recherche indépendant, qui s'appuyait sur la loi américaine de liberté de l'information.
"L'idée la plus répandue dit que l'erreur américaine a été de ne pas envoyer assez de soldats en Irak", a commenté Thomas Blanton, directeur des archives. "Mais le jeu de guerre Desert Crossing de 1999 suggère que nous aurions été en situation d'échec même avec 400.000 soldats mobilisés", a-t-il ajouté.
Le nombre de soldats américains en Irak est actuellement de 144.000, alors que le contingent le plus important avait été atteint en janvier, avec 160.000 hommes.
Une porte-parole du Commandement central américain, qui avait sponsorisé le séminaire et déclassifié le rapport secret en 2004, n'a pas souhaité faire de commentaires, expliquant que ces documents ne lui étaient pas familiers.
Ces jeux de guerre avaient pour objet d'envisager les "pires situations" et les scénarios les "plus probables" après qu'une guerre auraient déposé l'ancien président irakien Saddam Hussein.
Certaines de leurs conclusions sont très proches de la situation actuelle en Irak : remplacement du régime problématique, stabilité en péril en raison des divisions religieuses et ethniques et de la lutte pour le pouvoir, ou montée du sentiment anti-américain dans l'Iran voisin.
dimanche 5 novembre 2006,
3 Dossier & Point de vue
Ndlr : PS : la publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage toutes les analyses des auteurs
mais doit être vu comme information
Marc
3-1 Carlos Varea, Pedro Rojo et Houmad El Kadiri : Le Commandement Politique Unifié de la Résistance Irakienne est né.
01-11
Un pas capital vers la consolidation du camp anti-occupation et de son alternative nationale et démocratique
« L'annonce de la création du CPURI est capitale, car il unifie pratiquement la base sociale, politique et militaire contre l’occupation, en intégrant des personnalités et des organisations tant du Front Patriotique Nationaliste et Islamique que du Congrès Fondateur National Irakien, qui étaient jusqu'à maintenant deux blocs bien rapprochés mais sans connexion formelle entre eux. Ceci représentera un renforcement remarquable du camp anti-occupation et de sa résistance armée, à un moment où les USA viennent de reconnaître par le biais de leur ambassadeur à Bagdad qu’ils entretiennent des nouveaux contacts avec secteurs de la résistance irakienne et ont demandé l'intervention des pays arabes voisins ; ces démarches, bien qu'elles aient été immédiatement niées par des porte-parole irakiens des formations armés, manifestent au moins les intentions de l'Administration Bush de freiner l’effondrement final de l'occupation. »
Juan Kalvellido : Le CPURI
S’en remettant à des différentes sources irakiennes, le journal indépendant al-Quds al-Arabi publié en langue arabe à Londres a confirmé dans son édition du 27 octobre 2006 la création du Commandement Politique Unifié de la Résistance Irakienne (CPURI), après « [...] des contacts et gestions » entre personnalités et organisations sociales, politiques et militaires du camp anti-occupation et contraire à la politique du processus imposée par les USA [1].
Des interlocuteurs irakiens contactés tant à l'intérieur du pays qu’en Europe par la Campagne espagnole contre l'Occupation et pour la Souveraineté d'Irak (CEOSI) ont confirmé la création du CPURI.Le CPURI est formé par les 25 membres (15 de l'extérieur et 10 de l'intérieur d'Irak) qui représentent le Parti Socialiste Arabe Baaz, l'Alliance Patriotique Irakienne [2], le Commandement Général des Forces Armées, (intégré par les anciens chefs militaires) les courants des « communistes patriotes » opposés à la ligne collaboratrice de la direction du Parti Communiste Irakien [3], l'Association des Oulémas Musulmans (l’instance religieuse sunníte suprême d'Irak [4]), l'ayatollah chiite Ahmed al-Hussaini al-Bagdadi, le Courant Nationaliste et Nassérien et l'Armée al-Rashidin, l’Armée Islamique et les Brigades de la Révolution de 1920, ces trois dernières étant des formations militaires, la première intégrée par des ex-militaires et les deux autres de filiation islamiste sunníte non takfiriste.
L’effondrement de l'occupationL'annonce de la création du CPURI est capitale, car il unifie pratiquement la base sociale, politique et militaire contre l’occupation, en intégrant des personnalités et des organisations tant du Front Patriotique Nationaliste et Islamique [5] que du Congrès Fondationel National Irakien [6], qui étaient jusqu'à maintenant deux blocs bien reliés mais sans connexion formelle entre eux.Ceci représentera un renforcement remarquable du camp anti-occupation et de sa résistance armée, à un moment où les USA viennent de reconnaître par le biais de leur ambassadeur à Bagdad qu’ils ont des nouveaux contacts avec secteurs de la résistance irakienne et ont demandé l'intervention des pays arabes voisins [7]; ces démarches, bien qu'elles aient été immédiatement niées par des porte-parole irakiens [8] des formations armés, manifestent au moins les intentions de l'Administration Bush de freiner l’effondrement final de l'occupation.Parmi les membres de ce commandement politique se trouvent Qais Mohamad Nuri (baaziste), Jader Wahid al-Murshidi (lié à l’ayatollah chiite al-Bagdadi), Auni Qalamyi [9], Ahmed Karim, Yusef Hamdan [10], Abdelyabar al-Kubaysi [11], Abderrazaq al-Saadi, Abdelkarim Hani, Arshed al-Zibari, Buzina Nasiri, et des représentants de l'Association des Oulémas Musulmans. D'après les sources irakiennes consultées, l'ancien vice-premier ministre d'Irak, Izzat Ibrahim aura été le lien des contacts parmi les personnalités et les organisations politiques, militaires et communautaires qui intègrent le MPURI.Un communiqué officiel de la direction du parti Baaz - dans lequel cette formation reconnaît le caractère pluriel de la résistance irakienne et réitère son engagement dans un projet intégrateur et démocratique de reconstruction nationale d'Irak [12] - a devancé de quelques jours l’annonce de la création de cette nouvelle structure du champ contre l’occupation, sans un doute une très bonne nouvelle pour la cause de la libération d'Irak.
Carlos Varea, Pedro Rojo et Houmad El Kadiri, le 31 octobre 2006Traduit par Manuel Talens
Notas (en espagnol):1. http://www.alquds.co.uk:8080/archives/pdf/2006/10Oct/27OctFri/qds01.pdf, según traducción de Houmad El Kadiri y Pedro Rojo, IraqSolidaridad.2. Ver en IraqSolidaridad: Reunión de la Delegación de la CEOSI con el Partido Baaz, la Unión del Pueblo y la Alianza Patriótica Iraquí - Proyecto de creación del Frente de Liberación Nacional y referencias en notas 5, 9 y 11.3. Ver referencia en nota anterior y las incluidas en la nota 8.4. Ver en IraqSolidaridad: Carlos Varea y Pedro Rojo: ¿Quién mata a quién en Iraq y por qué? El debate interno sobre los atentados indiscriminados y sectarios (encuentro en Bagdad con la delegación de la CEOSI) y El borrador para una nueva Constitución iraquí: Comunicados de la Asociación de Ulemas Musulmanes y de la de la Alianza Patriótica Nacional . La web de la AUM es: http://www.iraq-amsi.org/5. Sobre el FPNI, ver en IraqSolidaridad: La resistencia armada se coordina bajo la dirección del Consejo Militar Supremo de los 'Muyahidines'. Creado el Frente Patriótico Nacionalista e Islámico de Iraq Carlos Varea: ¿A quién beneficia ¿A quién beneficia la violencia sectaria en Iraq? - Declaración del FPNI sobre operativos de los cuerpos de seguridad iraquíes en Bagdad y su periferia Al-Kubaysi presenta ante la Asamblea estatal de la CEOSI la creación del Frente Patriótico Nacionalista e Islámico como el mayor logro de la resistencia6. Puede leerse en IraqSolidaridad sobre el CFNI: Un amplio abanico de fuerzas sociales y políticas anuncian el rechazo de las elecciones de enero de 2005 - Declaración del Congreso Fundacional Nacional Iraquí llamado al boicot de las elecciones Documento Final de la Segunda Asamblea del Congreso Fundacional Nacional Iraquí Comunicado del Congreso Fundacional Nacional Iraquí tras las elecciones: Un proyecto soberano, democrático e integrador para Iraq Declaración del Congreso Fundacional Nacional Iraquí sobre el referéndum constitucional - Comunicado de la Asociación de Ulemas Musulmanes contra las amenazas a Siria7. The Washington Post, 24 de octubre, 2006. El diario británico The Sunday Times avanzaba esta información dos días antes. Jalilzad incluso ofreció abrir la incorporación del Partido Baaz al proceso político.8. Asharq al-Awsat, 23 de octubre, 2006. Ver en la columna de esta misma página, un extracto de la misma. 9. Residente en Europa, invitado por la CEOSI, de él puede leerse en IraqSolidaridad entre otros textos: Auni Qalamyi: ¿Está la resistencia iraquí negociando con EEUU?10. Invitado por la CEOSI y el PCE en 2005 y 2006. Ver en IraqSolidaridad: El PCE reconoce a la Unión del Pueblo como "organización comunista hermana" en Iraq. Yusuf Hamdan, dirigente comunista iraquí de la UP, participará en la Fiesta del PCE y realizará un gira por el Estado español y Los comunistas iraquíes opuestos a la ocupación e Imán Jamás participan en la Fiesta del PCE 200611. En dos ocasiones invitado al Estado español, ver en IraqSolidaridad: Al-Kubaysi presenta ante la Asamblea estatal de la CEOSI la creación del Frente Patriótico Nacionalista e Islámico como el mayor logro de la resistencia, además de: Noticias breves y audio mp3 2004-2005 y Entrevista a Abdelyabar al-Kubaysi tras su liberación: "Varios detenidos murieron bajo tortura". De la API: Comunicado de la Alianza Patriótica Iraquí: "La resistencia iraquí es la resistencia del pueblo" - Tras los atentados de Nayaf y Karbala: ¿A quién favorecen?12. Ver en IraqSolidaridad: Programa Político del Partido Baaz: El Programa de la Resistencia y la Independencia. El Baaz reafirma su compromiso con un Iraq democrático e integrador a través de la resistencia, así como: Reunión de la Delegación de la CEOSI con el Partido Baaz, la Unión del Pueblo y la Alianza Patriótica Iraquí - Proyecto de creación del Frente de Liberación Nacional y La resistencia armada se coordina bajo la dirección del Consejo Militar Supremo de los 'Muyahidines'. Creado el Frente Patriótico Nacionalista e Islámico de IraqNational Security Archive: http://www.gwu.edu/ 7/8nsarchiv/index.htmlTlaxcala remercie ses camarades d'IraqSolidaridad pour la communication amicale de cette nouvelle extraordinaire. Illustratiion ajoutée de Juan Kalvellido, membre de Tlaxcala.URL de cette nouvelle: http://www.tlaxcala.es/pp.asp?reference=1424&lg=es
3-2 Point de vue de Alain Joxe : l’unilatéralisme impérial et les guerres asymétriques. (Israël en Palestine et au Liban et guerre d’Iraq)
(partie Irak)
Les guerres asymétriques nouvelles se transforment elles mêmes sous nos yeux avec l’expérience d’un succès relatif du plus faible. C’est un paradoxe qui est décrit à l’avance par une certaine littérature militaire américaine faisant la critique de l’impasse iraquienne, considérée comme erreur stratégique, équivalente à l’impasse des années 60 au Vietnam [1]. Mais la doctrine américaine demeure celle de l’écrasement de l’ennemi sans négociation et de la destruction des souverainetés étatiques. Du moins tant que l’Europe ne se rebiffe pas ? L’enjeu de la « sortie de crise » au Liban est d’importance globale car c’est peut-être un premier coup d’arrêt à l’unilatéralisme extrémiste des Etats-Unis qui cependant continue à se manifester pleinement en Iraq. ….
La paix par un règlement global serait-elle finalement à portée de la main ? Il ne faut pas être trop optimiste ni, en tout cas, négliger les questions graves que posent le leadership américain dans cette région du globe. Pourquoi favoriser des guerres dans le Grand Moyen-Orient, ce qui contribue à augmenter l’opposition mondiale à leur leadership global et à renforcer le terrorisme de désespoir ? L’expérience Iraquienne désastreuse de la guerre urbaine, (lancée sur deux mensonges avérées par un rapport du Sénat), ne leur suffit-elle pas ?
Ont ils vraiment l’intention de menacer l’Iran d’une guerre totale, au nom d’une lutte contre le chiisme, alors que leurs seuls alliés en Iraq sont actuellement la majorité démographique chiite ?
L’équipe Bush a-t-elle perdu la tête ? La question mérite sans doute d’être posée. B. GUERRE D’IRAQ UN SUCCES ? Mais il faut aussi construire l’hypothèse contraire, à savoir que le gouvernement Bush n’a pas du tout perdu la tête et mène une stratégie cohérente et puissante d’écrasement de toutes les sociétés du Moyen Orient par des opérations dissymétriques essentiellement destructives de l’Etat. Les démolitions principales sont confiées en sous-traitance à des communautés ou à des états locaux alliés, asservis ou craintifs. Le président Bush persiste et signe un auto-satisfecit dans les cérémonies de l’American Legion, le 31 août. Il n’est pas forcément proche de sa chute. La CIA avait naguère été considérée comme faisant campagne contre la réélection de Bush pour avoir commis des rapports négatifs. On s’avise aujourd’hui qu’au début de la guerre d’Iraq on admettait publiquement que la solution la meilleure, pour le maintien de l’emprise indirecte des Etats Unis, pouvait être la division de l’Iraq en trois morceaux : un Kurdistan, un Chiistan un Sunnistan. « Malheureusement », ces trois « communautés » étaient mêlées au niveau des sociétés urbaines. (comme naguère en ex-Yougoslavie) la « balkanisation communautaire » de l’Iraq exigeait donc une purification ethnique intra-urbaine, et donc un bon paquet de massacres et de personnes déplacées. On peut dire aujourd’hui qu’un « succès » pratique de l’option « triple-guerre-civile, sécessions, apartheid » est masqué par l’échec de la politique affichée : « occupation-reconstruction-de-l’Etat démocratique, départ ». Le succès des Etats-Unis c’est l’auto-destruction de l’Etat qu’ils coordonnent dans le cadre de la Constitution nouvelle, une violente tripartition communautaire alimentant, sans frais une guerre civile générale et une médiation « externalisée » des Etats Unis. L’envoi, en août, de renforts terrestres annoncent non pas un effort supplémentaire d’occupation mais la phase de repli des troupes d’occupation hors de la « zone verte » du bunker de Bagdad, sur des positions préparées à l’avance, dans les bases off-town du désert, et qui n’opéreront plus, ensuite, que par expéditions punitives, destinées à protéger la zone pétrolière Kurde. Freinage du modèle bushiste de destruction des Etats ? On peut dès lors aussi revisiter la guerre Israël-Palestine, et la guerre Israël-Liban et admettre l’hypothèse, que le gouvernement Bushiste poursuit avec continuité une entreprise de destruction totale de la souveraineté des Etats moyen-orientaux : la destruction de l’Etat dans la Palestine du Mandat est bien avancée, (y compris le délabrement de la souveraineté d’Israël) ; la destruction du Liban n’est qu’un succès mitigé. On espérait mieux dans un pays où l’état tombe normalement aisément en morceaux confessionnels. L’effet fut inverse et le processus méritait donc d’être interrompu avec l’accord ambigu de l’Europe. Cette critique politique peut passer pour un compliment stratégique car elle rétablit une cohérence à long terme dans ce qui parait d’abord un simple chaos et un échec global. Le débat cependant est ouvert chez les militaires américains eux mêmes. Dans les « guerres de IV° génération », on ne parvient pas à déboucher dans la « phase IV » de la victoire, celle où selon Clausewitz, l’adversaire perd non seulement les moyens de se battre mais la volonté de se battre. Selon un auteur « les perfectionnements technologiques qui ont accru la capacité de détruire les moyens de combattre » ne servent plus alors ; la victoire dans ce sens, n’est plus de la compétence des forces armées seules mais exige une coordination entre toutes les agences de l’exécutif impliquant le maintien de l’Etat, de la culture, et une vision acceptable du futur dans le pays battu. Ce débat est-il début d’un retournement ? La grande stratégie bushiste ou rumsfeldienne serait-t-elle inacceptable, en Iraq, pour les Démocrates ? Rien n’est moins certain. Dans une tribune publiée par le New York Times, en mai 2006, une version soft du projet de tripartition était préconisée par le sénateur Joseph Biden, principal élu démocrate de la commission des Affaires étrangère. Il estime que, constatant que les efforts entrepris par l’administration Bush pour doter l’Irak d’un gouvernement centralisé et fort sont un échec et une mission impossible, l’Irak devrait être divisé en trois régions - Kurde, Sunnite et Chiite - bénéficiant d’une large autonomie. « Il est de plus en plus manifeste, dit-il, que le président Bush ne dispose d’aucune stratégie pour la victoire en Irak. En fait, il espère éviter la défaite et transmettre le problème à son successeur ». Cette division « huntingtonienne » de l’Irak s’inspirerait de l’exemple de la Bosnie : selon J. Biden, il aurait l’aval des sunnites irakiens, principale force de l’insurrection. Au gouvernement central reviendraient le contrôle des frontières, les affaires étrangères et la gestion des revenus du pétrole. Bagdad serait déclarée "zone fédérale" et placée sous la protection d’une force de police internationale "Certains diront que cette évolution vers un régionalisme fort déclencherait des opérations de nettoyage confessionnel. Mais c’est exactement ce qui se passe déjà, à une échelle accrue", se justifie-t-il. Les Etats-Unis retireraient leur contingent d’ici 2008, à l’exception d’une petite force de combat contre le terrorisme. Vers une reprise de la guerre ou une défaite de l’unilatéralisme En promettant d’avance aux Etats-Unis une prochaine guerre du Liban triomphante, M. Olmert s’excuse d’avoir commis une erreur stratégique et opérationnelle, en somme d’avoir mal calculé le coup. Ses propres « va-t-en guerre » militaires ont peut être été influencés par les va-t-en guerre américains. Mais les Etats Unis sont très critiques de sa gestion et ils ont noté l’échec, en votant la résolution française qui permettait d’arrêter le cafouillage pire qu’aurait été une occupation israélienne prolongée du Liban sud jusqu’au Litani,. Sans « victoire de phase IV » elle aurait consolidé l’union nationale intercommunautaire Libanaise au lieu de la détruire. Le freinage d’Israël par l’Amérique de Bush est bien destiné à sauvegarder son rôle régional unilatéraliste pour l’avenir. Mais du côté européen, toutefois, ce qui domine, c’est l’espoir d’un retour au règlement négocié global au Moyen-Orient. C’est à dire une défaite de l’unilatéralisme. L’Union Européenne devrait bien faire le point à cette occasion, et se dégager, pour solde de tous comptes, des filets du système unilatéraliste qui mène des peuples entiers à la mort, y compris le peuple israélien, interdit, sauf un changement profond, de se dégager de la dynamique unilatéraliste globale des Etats-Unis. Cette stratégie fait d’Israël un pion communautaire guerrier, sacrifié à terme sur l’échiquier de l’Empire. Alain JOXE Cf.Douglas Jehl « Report Says White House Ignored CIA on Iraq Chaos » The New York Time, Thursday 13 October 2005. Cet article cite un rapport de juillet 2004 fait par d’anciens fonctionnaires du renseignement selon qui Bush n’a pas prêté la moindre attention aux rapports de la CIA qui avertissait que des obstacles culturels et politiques s’opposeraient à toute stabilité dans l’après guerre. Cf. Joseph McCALLION, op.cit. Dans une tribune publiée par le New York Times, le 2 mai 2006,
Mercredi 01 Novembre 2006
3-3 Attaque du camp Falcon par la Résistance Irakienne : Explosions d'armes à l'UA, et ou d'armes nucléaires tactiques ?
Destruction du Camp américain Falcon: Explosions d'armes à l'UA, et ou d'armes nucléaires tactiques ?
La résistance irakienne porte des coups de plus en plus sévères à l’occupant, et la mesure peut en être appréciée par le niveau des demandes de rallonge budgétaire faites par les différents corps d’armée. Des enveloppes d’urgence sont consenties régulièrement par les Représentants, en fait les Chambres d’enregistrement de l’administration Bush, selon les requêtes des porte-paroles de l’Us force, de l’Army au lieu d’être sont présentées et argumentées soit par le ministre de la Défense, soit par le chef d’état major commis localement.
Ce n’est là que le moindre des signes du désordre d’un pouvoir dispersé et mis sous tension d’intérêts lobbyistes disparates et parfois contradictoires.507 milliards ont été votés régulièrement le mois passé comme budget pour 2007.70 milliards supplémentaires ont déjà été accordés aux forces terrestres.
50 autres milliards sont demandés pour l’US Force à compter sur le budget 2008 et 80 milliards de plus pour l’Army.
En 11 ans, la guerre au Vietnam n’a conduit à des dépassements que par deux fois.La destruction de l’entrepôt d’armes US à la base de Falcon, au Sud de Baghdad, le mardi 10 octobre vers 22 heures (heure locale), l’un des sites les mieux surveillés et défendus par l’occupant a été filmée et diffusée par deux sources différentes. L’incendie parti d’un tir nourri de mortier a duré toute la nuit. Elle atteste de la fragilité des positions de l’occupant. L'attaque particulièrement dévastatrice aurait fait environ 300 morts (Ce camp héberge plus de 3000 personnes en temps normal), des soldats américains, et des Marines, ainsi que des agents de la CIA et des traducteurs US. Il y a eu aussi 165 blessés graves et 39 blessés légers. 9 avions gros porteur marqué du sigle de la Croix Rouge ont été vu par des journalistes étrangers, atterrissant et décollant emportant les morts et les blessés.
En plus, 122 soldats irakiens ont été tués ainsi que 90 sérieusement blessés qui ont été évacués vers l'hôpital militaire américain d'al-Habbaniyah situé à environ 70 Km de Bagdad.
Mais silence complet du côté des autorités militaires américaines, de l'administration Bush aux abois.Les merdias occidentaux n’ont pas traité la nouvelle.Cet événement est la claire démonstration que la zone verte elle-même n’est pas réellement sous contrôle d’une troupe majorée à plus de 70 000 soldats à Baghdad depuis l’opération Together Forward débutée en juin 2006 avec couvre-feu de 21 heures à 6 heures et check-points à l’israélienne.De plus, outre qu’il a déclenché une explosion en chaîne de dispositifs incendiaires bien visibles (voir la vidéo Al-Jazeera ci-jointe) sur l’enregistrement, il a donné lieu à l’explosion d’une bombe vraisemblablement atomique.Ce n’est qu’après deux mois que la présence de radioactivité intense sur des cratères de bombes israéliennes au Liban a été révélée, quand donc des compteurs Geiger vont être dépêchés sur les lieux de l’un des crimes occidentaux ?
Ce premier novembre 2006, Nuri Maliki a ordonné la levée des barrages militaires US et des forces de collaboration qui assiégeaient Sadr City.Il a ainsi consacré la victoire des résistants de cette ville.Rumsfeld n’a pas annoncé le nombre des renforts (mercenaires contractuels ou soldats ?) actuellement entraînés qui seront expédiés en Irak, pour tirer de l’Uranium appauvri et y être exposés. Mais le chiffre de 100 000 circule depuis des sources anonymes …

A voir les 2 vidéos
Video d'Al Jazeera http://www.cyberspaceorbit.com/TacticalNukeDetonatedInIraq.wmvVideo http://youtube.com/watch?v=LlM3BDojdLo&...ted&search=Traduction des informations données Urgent : "Une série d'explosions suite à un incendie dans un hangar de munitions dans une base américaine située au sud de la capitale irakienne". Journaliste : Une série d'explosions a secoué la capitale irakienne Baghdad vers 22h et deux heures après l'incendie prend de l'ampleur comme en témoignent les flammes et la fumée et les explosions s'intensifient. Selon des témoin visuels dont celui qui parle de Baghdad (= Nizar Esamarai) l'incendie s'est déclaré dans le hangar après des tirs de roquettes sur ce hangar. Il semble que deux heures après l'incendie il est impossible de le maîtriser. Des éclats de bombes et de roquettes sont projetés très loin, à plus de 20 Km de la base (là où habite le témoin). Des patrouilles de police, de l'armée et de la garde nationale parcourent la région pour s'assurer de la sécurité des habitants en les avertissant des risques de chute de roquettes sur les maisons et donc du danger de s'exposer. Parallèlement des hélicoptères américains survolent la région "intensément" (tel que dit par le témoin ndlt). Ce très grand hangar, (qui renferme une très grande quantité de munitions dont le détail n'est pas donné ndlt) est essentiel car il alimente les troupes et casernes de la région (selon le témoin ndlt). L'armée américaine assure qu'il n'y a pas de victimes et que la cause est un incendie qui s'est déclaré dans le hangar alors que les responsables du gouvernement disent ne pas connaître la cause de l'incendie. Après la grande lumière due à la dernière explosion (celle qui arrive à l'écran ndlt ) le journaliste essaye de rappeler le témoin pour des explications mais la liaison et rompue. Traduction par Abida. Z notre correspondante à Alger. C'est ce qui a été dit sur cet incendie et les explosions sur cette chaîne de TV.
Le journaliste insistait sur l'intensité des explosions, les flammes et la fumée. Les explosions sont également toutes décrites comme « immenses » par les reporters de la BBC, qui mentionnent qu'elles ont continué pendant toute la nuit. Selon Andrew North, correspondant de la BBC à Bagdad, les explosions ont commencé vers 23 heures locales (21 heures, heure de Londres) et devenaient "de plus en plus fréquentes" à mesure que les énormes incendies s'étendaient à toute la base, ponctués de terribles explosions lorsque de nouveaux dépôts de carburant et de munitions étaient atteints par le feu. Une deuxième vidéo, cette fois tournée par des soldats américains http://youtube.com/watch?v=UBMqTpDnitA&mode=related&search= montre plus clairement ces « champignons » de fumée noire. Certaines de ces explosions sont d'une telle puissance qu'elles aveuglent la caméra qui filme mais qui se trouve pourtant à une grande distance de celles-ci. Les soldats qui commentent pendant le tournage parlent d'une onde de choc puissante, et s'inquiète de la direction du vent, indiquant qu'ils se préoccupent d'éventuelles retombées soit chimiques et ou radioactives. Le tournage s'accompagne de bruits de sirènes. Parmi les munitions stockées à Camp Falcon, il y avait, les troupes américaines en utilisent en Irak (à Fallujah par exemple), des bombes au phosphore (nuages blancs sur les vidéos) et des bombes à l'Uranium Appauvri (explosions avec multiples flammèches comme visualisées sur des vidéos de la prise de Bagdad en 2003 où des bombes à l'UA ont été utilisées). Les dégâts pour les populations environnantes et pour la population mondiale, car les particules à l'UA ne reconnaissent pas les frontières, de telles explosions de bombes à l'UA sont inqualifiables. La question qui se pose c'est : n'y avait il pas non plus une ou des minies bombes tactiques nucléaires d'entreposées là pour servir éventuellement à une attaque nucléaire contre les installations nucléaire iraniennes ? Cette question peut se poser en lien avec les nuages type champignon atomique vus sur les vidéos. Mais, une explosion nucléaire aurait provoqué un énorme cratère sur place, les pays voisins auraient été mis en état d'alerte maximum à cause de la pollution radioactive de l'air et de l'eau (ceci dit, les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl a bel et bien été passée sous silence ici en France), de nombreuses victimes seraient à déplorer tant chez les américains que chez les irakiens des alentours suite à ces explosions, la contamination radioactive auraient également touchés les sauveteurs sauf s'ils étaient munis d'équipements de protection. La question pour le moment reste sans réponse. Ces minis bombes nucléaires dites pénétrantes, sont d'environ 1 kilotonne (1000 tonnes d'explosifs) appelée dans le jargon militaire « small built » armes, (armes de petit format). Un article de la BBC d'août 2003 rapportait la tenue d'une conférence sur le développement de ces « mini bombes atomiques » à StratCom, les quartiers généraux du commandement stratégique US au Nebraska. Il y a été discuté des besoins en armes nucléaires qui produisent de petites quantités de radiation, des armes à pénétration profonde pour attaquer des bunkers, et d'armes de taille plus grande avec des effets radioactifs plus puissants pour détruire des agents chimiques et biologiques. Ces mini bombes atomiques, constituent avec les bunker busters plus puissantes ce qu'on appelle les « Earth Penetrator Weapons » (EPWs). Elles sont facilement utilisables via le système GPS de guidage satellite. Le concept d'utilisation de ces mini bombes nucléaires remonte à 2001 et leur utilisation fait partie d'une nouvelle stratégie en matière de politique nucléaire impulsée par l'actuel ministre de la défense américain Donald Rumsfeld. Une nouvelle Triade devait remplacer l'ancienne consistant en largage de bombes par air, tirs de missiles équipés de têtes nucléaire par voie terrestre et maritime (navires de guerre et sous marins). La nouvelle Triade comprend :
La totalité de la première Triade
Des systèmes de Défense incluant le système national de défense par missile ou la défense par missile anti balistique.
Une infrastructure revitalisée qui fournirait des capacités nouvelles au moment opportun pour affronter des menaces émergeantes et cela veut dire des mini bombes et autres même type d'armements, et la capacité de concevoir et de les construire dans une programmation quinquennale.
L'un des objectifs de ces minis bombes nucléaires seraient d'attaquer les caches clandestines souterraines (protection pour les militants et leurs munitions) de ceux déclarés « terroristes » par l'administration américaine ou les centres de commande souterrains d'un pays ennemi. Ces armes nucléaires seraient dites « propres », d'après leurs promoteurs, car elles ne provoqueraient aucune destruction externe, puisque utilisées dans des cavités profondes. Les radiations et le nuage radioactif seraient ainsi contenus. En réalité il y aura des retombées radioactives provoquant mort et maladies pour plusieurs milliers voire millions de personnes et des catastrophes écologiques, Une chose est sûre, d'importantes quantités d'armes à l'UA ont été détruites à Camp Falcon le 10 octobre près de Bagdad en Irak. La contamination à l'échelle planétaire continue non stop. Il est plus qu'urgent de mobiliser pour demander l'interdiction de ces guerres nucléaires à l'uranium appauvri qui ne disent pas leur nom. TOUS concernés car TOUS touchés. Gare aux particules à l'UA! Attention à l'Empire US sur le déclin
3-4 Point de vue de James Cogan et Peter Symonds : Tensions entre les gouvernements des Etats-Unis et de l’Irak ont encore augmenté .
Dans un geste sans précédent, le premier ministre irakien Nouri al-Maliki a émis un communiqué de presse mardi après-midi disant qu’il avait « ordonné » à l’armée américaine de mettre un terme à l’encerclement de Sadr City qui durait depuis près de sept jours, supposément en tant que partie des opérations de recherche d’un soldat américain qui a été prétendument enlevé par des militants chiites. Sadr City est le bastion du mouvement chiite dirigé par l’imam Moqtada al-Sadr et son Armée du Madhi.
Il y a peu de doute que Maliki a émis sa déclaration sans auparavant en avertir les forces d’occupation. Le New York Times a rapporté que les responsables américains ont gardé « le silence pendant des heures sur cette question » avant de déclarer que l’ordre était une décision conjointe de l’Irak et des Etats-Unis prise par Maliki, l’ambassadeur américain Zalmay Khalilzad et le général George Casey. Plus tôt, toutefois, un porte-parole de l’armée américaine n’avait pu cacher sa surprise lorsqu’il fut questionné par le Times. Il a dit que les commandants américains avaient obtenu le communiqué de presse et « considéraient quelle était la meilleure façon de répondre à ces questions ».
Maliki a déclaré que l’ordre était nécessaire pour « ouvrir les routes et faciliter la circulation ». La raison véritable est le niveau très élevé de tension au sein de la population chiite en Irak. Depuis des mois maintenant, l’administration Bush demande constamment au gouvernement Maliki, dominé par l’Alliance irakienne unie (AIU), une coalition de partis chiites, d’autoriser un assaut sanglant sur Sadr City pour « désarmer » l’Armée du Mahdi, ce que Maliki a refusé à plusieurs reprises.
Le mouvement sadriste est la plus importante faction au sein de l’AIU. Une attaque contre elle signifierait la fin de la coalition et minerait sérieusement le gouvernement. De plus, l’Armée du Mahdi bénéficie du soutien des masses chiites qui, après avoir subi des dizaines d’années de répression par le régime baasiste, considèrent qu’il est vital de maintenir une force armée indépendante de tout gouvernement à Bagdad. A Sadr City, la milice est vue comme l’unique moyen sérieux de défense contre les extrémistes sunnites et les forces américaines d’occupation, dont la présence suscite une opposition farouche de la population du district, principalement composée de la classe ouvrière et de la population pauvre.
En conséquence du refus de Maliki de lâcher les sadristes, les médias américains et irakiens sont remplis de spéculation que l’administration Bush prépare un coup d’Etat pour mettre au pouvoir une junte militaire qui donnerait le feu vert à une offensive contre la milice chiite. Dans les rues de Sadr City et les autres villes largement chiites, telles Najaf, Kufa, Karbala, Amarah et Basra, les actions américaines ont provoqué une opposition féroce.
La mise en place la semaine passée de barrages routiers et de points de contrôle sur toutes les routes importantes permettant d’accéder à Sadr City a provoqué des tensions fiévreuses. Lundi, reflétant la pression d’en bas pour répondre ouvertement à l’armée américaine, Moqtada al-Sadr a émis une déclaration menaçante : « si le siège continue longtemps, nous recourrons à des actions que je n’aurai d’autres choix que de prendre ». Il a dénoncé les membres du parlement irakien pour garder le silence.
Mardi, le septième jour du « siège », le mouvement sadriste a annoncé une grève générale de protestation. Toute la banlieue de 2,5 millions de personnes s’est arrêtée, faisant place à des patrouilles de miliciens dans les rues.L’intervention de Maliki a reflété de profondes inquiétudes à l’intérieur du gouvernement qu’un mouvement de grève ferait rapidement boule de neige, car les Irakiens évacueraient leur haine contre l’occupation et les conditions sociales désastreuses. Un porte-parole sadriste, Jalil Nouri, a déclaré à l’agence de presse United Press : « S’ils n’avaient pas levé le siège, notre grève se serait propagée au reste de Bagdad le lendemain et partout en Irak le jour suivant. »
Les actions de Maliki ont attisé le débat à Washington sur l’avenir de son gouvernement. Il se développe un consensus dans l’administration Bush et les médias, et parmi les républicains et les démocrates que le gouvernement chiite ne constitue pas un moyen viable de réaliser les ambitions des États-Unis en Irak. Tout ce verbiage à propos de la « démocratie » en Irak a été mis de côté, avec une intense frustration face au fait que Maliki n’ait pas suivi les ordres américains de se réconcilier avec les élites sunnites et de réprimer les milices chiites.
Hillary Clinton, un important sénateur démocrate, a dénoncé mardi le gouvernement Maliki dans un discours devant le Conseil sur les relations étrangères, l’accusant d’avoir échouer à créer les conditions pour un règlement politique. « La crédibilité américaine est prise en otage par un gouvernement irakien qui ne respectera pas son engagement de trouver une résolution politique aux droits et aux rôles de la minorité sunnite et de déterminer la distribution des revenus du pétrole », a-t-elle déclaré.
On reconnaît de plus en plus à Washington que le gouvernement irakien est incapable de réaliser le type de « règlement politique » qui est proposé par les États-Unis. Atteindre une « réconciliation » avec la « minorité sunnite » signifie redonner aux anciennes élites baasistes au moins une partie du pouvoir dont elles profitaient sous le régime de Saddam Hussein. Avant tout, cela signifie changer complètement les plans d’une autonomie régionale significative pour le Nord kurde et le Sud chiite, incluant le contrôle d’énormes réserves de pétrole dans ces régions.
Pour les partis chiites, ces plans sont une abomination. Même si les chefs chiites en arrivaient à une entente de partage de pouvoir avec leurs homologues sunnites pour mettre fin à l’insurrection, rien ne garantit que les masses de travailleurs ordinaires accepteraient un tel accord. La réinstallation de généraux, de policiers et de bureaucrates baasistes dans des positions de pouvoir pour réprimer l’opposition à l’occupation américaine entraînerait inévitablement une colère et une hostilité généralisées. C’est pourquoi les appels à la « réconciliation » vont de pair avec les demandes américaines pour un règlement de comptes sanglant avec l’Armée du Mahdi et sa base de la classe ouvrière à Sadr City.
Le gouvernement Maliki pose aussi des difficultés à la réalisation de plans plus larges de Washington au Moyen-Orient. Tous les partis chiites au pouvoir ont des liens étroits avec l’Iran, qui est la cible des États-Unis pour un « changement de régime ». Toute agression américaine contre Téhéran provoquerait l’opposition des masses chiites de l’Irak, entraînant ainsi plus d’instabilités et de confrontations avec l’occupation américaine. L’ancien secrétaire d’État américain James Baker, qui préside l’éminent Groupe d’étude sur l’Irak qui étudie les options en Irak, a proposé d’obtenir l’appui de l’Iran pour arriver à un règlement en Irak. Mais rien ne garantit que l’administration Bush puisse ou veuille en arriver à une telle entente.
Les commentaires de Clinton reflètent l’accord des deux partis sur le fait que le régime de Bagdad doit être démis. Comme elle l’a dit au Conseil des Affaires étrangères : « En termes politiques, nous avons finalement atteint le point de l’absurdité complète. L’administration [américaine] annonce qu’elle propose un échéancier ou une date limite, et le premier ministre irakien les dénonce. » Cette déclaration annonce que les démocrates vont appuyer toute action visant à éjecter Maliki.

Ce ne sera pas la première fois que l’impérialisme américain se défait d’un de ses propres laquais. Hier marquait le 43e anniversaire du coup d’Etat appuyé par les Etats-Unis contre le président du Sud Vietnam, Ngo Dinh Diem. Bien que complètement loyal aux Etats-Unis, les méthodes autarciques de Diem avaient provoqué l’opposition populaire et miné les efforts de Washington de renforcer l’armée sud-vietnamienne dans la guerre civile contre le Front de libération nationale.
Le premier novembre 1963, des unités rebelles de l’armée marchèrent sur le palais présidentiel à Saigon. Diem, qui s’était enfui, courut frapper à la porte de l’ambassadeur américain, Henry Cabot Lodge, et se fit rassurer à l’effet que les Etats-Unis n’étaient pas impliqués dans le coup. Quelques heures plus tard, Diem se rendit, seulement pour être fusillé au côté de son infâme frère Ngo Dinh Nhu et remplacé par une junte.

Il y a maintenant de plus en plus une discussion ouverte à Washington sur le type de régime qui serait nécessaire à Bagdad. Disposer du gouvernement nominalement élu de Maliki et effectuer un tournant vers des sections de l’élite baasistes ne peut vouloir dire qu’une chose : l’établissement d’une junte
soutenue par les Etats-Unis et basée sur les forces de sécurité et l’appareil bureaucratique de l’Etat. Une telle formation ne serait pas différente de la dictature d’Hussein, de laquelle les Etats-Unis ont prétendu avoir « libéré » le peuple irakien.
Considérant les options pour les Etats-Unis en Irak, Eliot Cohen écrivit dans le Wall Street Journal le 20 octobre que « l’hypothèse la plus plausible » était « un coup que nous allons endosser silencieusement ». Cohen est associé à l’American Entreprise Institute, un groupe de réflexion de droite qui avait encouragé l’invasion de l’Irak en tant que premier pas vers la « démocratie » au Moyen-Orient. Il en est maintenant arrivé à la conclusion qu’« une junte militaire modernisatrice pourrait bien être le seul espoir pour un pays dont la culture démocratique est faible et dont les politiciens sont soient corrompus ou incapables ».
Malgré les assurances de Bush envers Maliki, la brèche ouverte entre l’administration américaine et le gouvernement irakien a été évidente cette semaine. Dans cette confrontation, le conseiller à la sécurité nationale Stephen Hadley s’est rendu à Bagdad sans s’annoncer pour un entretien avec Maliki. Hadley a clairement livré le message au premier ministre que des changements étaient requis. Mais le choix du conseiller à la sécurité nationale comme messager soulève des questions à savoir à qui d’autre il s’adressait et de quels plans ils ont discuté.
A Bagdad, les discussions sur le « changement de régime » sont encore plus ouvertes.
Le New York Times commentait dans un article mardi : « les journaux irakiens ont adopté le thème du changement de gouvernement, spéculant sur la possible composition d’un “gouvernement de salut national”, appuyé par les Etats-Unis, qui enlèverait le pouvoir de l’alliance chiite qui avait choisi Maliki pour premier ministre.
De hauts responsables irakiens ont dit que M. Maliki avait été profondément ébranlé par les rumeurs qu’il pourrait être forcé de quitter son poste d’ici la fin de l’année. »
Le pendant à toute action contre Maliki, va être un assaut sanglant contre l’opposition anti-américaine, particulièrement contre les masses chiites de Sadr City.
James Cogan et Peter Symonds
WSWS, 3 novembre 2006.
Article original anglais paru le 2 novembre 2006
Source : WSWS http://www.wsws.org/
3-5 Point de vue de Joe Kay : Plusieurs rapports font état de préparatifs d’un coup d'état en Irak.
(Les victimes d’Irak n’existent pas, ces victimes sont seulement un espace vide de la conscience du monde.)
Le premier ministre Maliki exprime ses doléances envers Washington.
Les tensions augmentant entre l’administration Bush et le chef du gouvernement à Bagdad soigneusement choisi par Washington, le premier ministre Nouri al-Maliki, ont explosé à la surface lors d’une rencontre vendredi dernier entre Maliki et l’ambassadeur américain en Irak, Zalmay Khalilzad.
En réponse aux pressions américaines de plus en plus importantes pour que Maliki sévisse contre les milices chiites hostiles à l’occupation américaine et aux critiques publiques de Maliki par les dirigeants militaires et politiques américains, le premier ministre s’est plaint que Khalilzad et l’administration Bush minaient la fiction officielle qu’il était le chef souverain du gouvernement démocratique.
« Je suis l’ami des Etats-Unis, mais pas l’homme des Etats-Unis en Irak », a dit Maliki à Khalilzad, selon Hassan Senaid, un des conseillers de Maliki.
Les commentaires de Maliki ont été précédés par une conférence de presse le 24 octobre, organisée dans la zone verte de Bagdad par Khalilzad et le commandant des forces américaines en Irak, le général George Casey. Khalilzad a annoncé qu’une entente avait été conclue entre le gouvernement irakien sur un échéancier pour une série de mesures pour établir la stabilité en Irak.
Les Etats-Unis demandent que Maliki arrive à une entente sur le partage des revenus du pétrole et sur d’autres questions avec les représentants de l’élite sunnite, y compris les baasistes associés avec le régime déchu de Saddam Hussein. Ils ont aussi exigé que Maliki soutient les plans américains d’attaques sur le bastion de la milice Armée du Mahdi, dirigé par l’imam chiite Moqtada al-Sadr, le populeux quartier chiite de Bagdad, Sadr City. (N.d.l.r. Les chiites irakiens s’inquiètent des affinités sunnites des USA, Reuters, 1er Novembre 2006.)
Maliki a répondu à la presse de conférence de Khalilzad et Casey en déclarant que le gouvernement irakien « est un gouvernement soumis à la volonté populaire et personne n’a le droit de lui imposer un échéancier ». Il a dit que son propre gouvernement n’a été impliqué dans aucune négociation sur un échéancier et que « seul le peuple qui a élu le gouvernement a le droit d’imposer des limites de temps ou des amendements ».
Ces commentaires ne sont que la plus récente indication de conflits entre le gouvernement Maliki et les occupants américains. Durant l’attaque israélienne sur le Liban cet été et qui était soutenue par les Etats-Unis, Maliki a dénoncé l’agression israélienne et plus tard a eu une rencontre très médiatisée avec le président iranien Ahmadinejad à Téhéran.
Le 13 octobre, Maliki a donné une entrevue à USA Today dans laquelle il déclarait son opposition aux préparatifs américains pour un assaut sanglant sur Sadr City, disant « La façon dont les forces multinationales pensent régler cette question, ce sera la destruction d’un quartier entier. »
Le 25 octobre, les Etats-Unis ont organisé un raid sur Sadr City, provoquant une réponse coléreuse de Maliki, qui a demandé - et obtenu - la libération d’un adjoint de haut rang de Sadr qu’avaient arrêté les forces américaines.
Alors que l’administration Bush a affirmé avoir confiance en Maliki, en coulisse elle prépare activement un coup pour mettre au pouvoir un gouvernement militaire qui aura promis de se soumettre aux diktats de Washington.
United Press International (UPI), qui est la propriété des éditeurs du quotidien de droite le Washington Post, a publié un reportage le 23 octobre, un jour avant la conférence de presse de Khalilzad et Casey, intitulé « Un coup contre Maliki est prétendument en préparation ». L’article disait que « Des officiers de l’armée irakienne planifient prétendument l’organisation d’un coup d’Etat militaire avec l’aide des Etats-Unis pour chasser le gouvernement du premier ministre Nouri al-Maliki ». Un tel coup est préparé « au cas où les tentatives du gouvernement Maliki pour restaurer l’ordre échoueraient ».
Citant « des sources arabes et irakiennes basées au Caire », l’UPI écrit que « plusieurs officiers irakiens » ont visité Washington récemment « pour avoir des pourparlers avec des responsables américains sur des plans pour remplacer l’administration de Maliki par un gouvernement de “salut national” ».
L’article continuait, « Parmi les officiers [irakiens] les plus en vue, on trouve l’assistant du chef de l’état-major, un chiite musulman, le chef des services du renseignement, un sunnite et le commandant des forces de l’air, un Kurde. On croit que les trois pourraient constituer le noyau du prochain gouvernement après que l’armée prenne le pouvoir.
« Le plan qui est suggéré, selon la source, stipule que la nouvelle armée irakienne, avec l’aide des forces américaines, prendra le pouvoir, suspendra la constitution, procédera à la dissolution du parlement, et formera un nouveau gouvernement. L’armée prendra aussi le contrôle direct des diverses provinces et de l’administration après avoir imposé l’état d’urgence.
« Une source arabe a aussi déclaré à UPI que certains pays arabes avaient été informés du plan. On aurait demandé leur aide pour convaincre les anciens chefs du régime destitué du Parti baasiste résidant dans leur pays de ne pas nuire à la procédure et d’arrêter la violence perpétrée par le parti en Irak. En retour, ils seront invités à participer plus tard au gouvernement. »
L’article de UPI n’est que le plus détaillé d’une série de reportages d’un possible coup d’État conçu par les États-Unis. Peu importe si le coup d’État est vraiment mis à exécution, les reportages sur de telles préparations sont mis en circulation pour augmenter la pression américaine sur Maliki pour qu’il exécute les demandes de l’armée des États-Unis.
En exigeant de Maliki qu’il approuve un assaut sur les milices chiites, les États-Unis réclament de lui qu’il attaque un important appui politique de ce régime hautement instable. Le premier ministre irakien, un chef du parti islamique chiite Dawa, est dépendant à l’intérieur de l’Irak des milices chiites, et en particulier de Sadr, qui possède un large appui parmi la population chiite de Bagdad et du sud du pays.
Il y a un aspect de farce dans les protestations de Maliki. Il est, après tout un pantin entre les mains des Américains qui a obtenu le poste qu’il occupe actuellement suite aux manœuvres de Khalilzad lui-même.
Washington a considéré que Maliki était plus malléable que le candidat initialement choisi par le Parti dawa, le parti dirigé par Ibrahim al-Jaafari. Maliki sait très bien que sa position dépend entièrement de l’appui des Etats-Unis - qu’il est, en fait, « l’homme des Américains en Irak ». Son régime n’a jamais été considéré par les États-Unis comme étant un pas vers la démocratie, mais plutôt un mécanisme assurant aux États-Unis le contrôle des ressources pétrolières de l’Irak et la consolidation de l’hégémonie militaire et politique américaine sur la région.
Mais dans sa tentative de sauver son gouvernement - et vraisemblablement sa tête - Maliki utilise le prétexte donné par l’administration Bush pour poursuivre l’occupation par les Américains après que l’argument de la présence d’armes de destructions massives et celui des supposés liens entre l’Irak et al-Qaïda se soient révélé n’être que des mensonges et s’effondrent : que Maliki est à la tête d’un État souverain démocratiquement élu, le produit et symbole de la mission de démocratisation de Washington en Irak, qui doit être défendu contre les ennemis « terroristes » de la démocratie, c.-à-d. les Irakiens qui résistent à la domination militaire américaine.
Alors que Washington commence à laisser tomber la « démocratie » en tant qu’objectif en Irak, y substituant plutôt la « stabilité », l’administration Bush s’est retenue de poser des gestes directs contre Maliki à la veille des élections américaines du 7 novembre. Un tel geste, accompagné d’une offensive dirigée par les Etats-Unis contre la milice sadriste, pourrait avoir des conséquences militaires et politiques explosives, incluant un possible soulèvement de la population chiite en Irak et l’érosion déjà dramatique de l’appui domestique en faveur de l’occupation.
Samedi, Bush a tenu une vidéoconférence avec Maliki afin de faire baisser la tension et affirmer l’appui des États-Unis au premier ministre.
Néanmoins, il y a plusieurs signes qui indiquent qu’une escalade majeure de la violence en Irak, particulièrement à Bagdad, est en préparation, avec ou sans Maliki, pour la période suivant les élections de la semaine prochaine, et qu’elle va recevoir un appui bipartisan des démocrates aussi bien que des républicains, quelque soit le résultat du vote. Les militaires américains ont déjà commencé à faire des incursions dans Sadr City sous prétexte de retrouver un soldat manquant.
L’élite dirigeante américaine est préoccupée par la puissance de la milice chiite pour deux raisons. Premièrement, il y a une énorme opposition parmi les masses chiites à l’occupation américaine. Deuxièmement, ces groupes ont des liens étroits avec le régime iranien.
En éliminant le gouvernement baasiste, les États-Unis ont créé un vide du pouvoir politique que l’Iran doit combler, même si les États-Unis poursuivent une stratégie parallèle de miner l’Iran et préparer de nouvelles attaques militaires contre ce pays. Cependant, une action prise contre l’Iran, va obliger les États-Unis à créer un nouveau régime client basé sur une combinaison différente de forces politiques, religieuses et ethniques au sein de l’Irak.
Joe Kay
1er novembre 2006
Article original publié le 31 octobre 2006.
Source : WSWS http://www.wsws.org/
3-6 Point de vue de James Cogan.: Revirement tactique de la politique US.
[Khalilzad a esquissé lundi soir ce qui est un revirement tactique de la politique américaine. L’administration Bush adopte en grande partie les demandes de l’élite américaine de réaliser une entente avec les baasistes dans le but de renforcer la « stabilité ». (...)
Pour sa part, la théocratie iranienne chiite, qui a mené un combat sanglant de huit ans contre les baasistes d’Irak, a peu d’incitation pour appuyer le programme américain à moins que des concessions majeures soient accordées par Washington sur des questions comme l’énergie nucléaire et les sanctions commerciales. Une offensive contre la milice chiite va probablement mener à l’effondrement du gouvernement irakien à dominance chiite et son remplacement par un régime hostile à Téhéran. (...)]
WSWS, 26 octobre 2006.
Une conférence de presse à Bagdad donne les grandes lignes de l’intensification de la guerre américaine.
La conférence de presse qu’ont donnée l’ambassadeur américain Zalmay Khalilzad et le général américain George Casey lundi soir à Bagdad, traçait les grandes lignes du « changement de cap » en Irak annoncé par la Maison-Blanche et le Pentagone. Au cours des prochains mois, l’administration Bush a l’intention d’amorcer une intensification téméraire de la violence pour tenter de sauver les intérêts américains de la catastrophe à laquelle elle fait maintenant face.
La ruine absolue de l’Irak imposée par trois ans et demi d’occupation était symbolisée par cette conférence.
Comme Khalilzad présentait ce qu’il a appelé la « stratégie et les plans pour le succès en Irak », une coupure de courant sur tout Bagdad a plongé la conférence de presse dans le noir pour près de quatre minutes. L’occupation américaine est incapable de garantir l’électricité même pour ses quartiers généraux lourdement fortifiés. Les Irakiens doivent se débrouiller avec deux ou trois heures de courant par jour, les pénuries d’essence et le chômage de masse. Des milliers de personnes meurent des conséquences de la guerre civile sanglante que l’invasion américaine a attisée entre les factions rivales sunnites et chiites.
La politique fondamentale de l’administration Bush pour assurer les intérêts américains en Irak a été celle de « diviser pour mieux régner ». Depuis 2003, les Etats-Unis ont impitoyablement réprimé la population arabe sunnite qui formait la principale base d’appui du régime baasiste de Saddam Hussein. Les gouvernements irakiens formés à Bagdad depuis l’invasion ont été dominés par les fondamentalistes chiites et les partis nationalistes kurdes, qui se sont vus offrir le pouvoir et les privilèges en échange de leur collaboration avec l’occupation. La nouvelle constitution adoptée l’an dernier a été écrite pour permettre aux gouvernements régionaux chiites ou kurdes au sud et au nord du pays de prendre le contrôle des réserves de pétrole de l’Irak et d’en superviser la vente aux sociétés transnationales de l’énergie que favorisent les Américains.
Le résultat a été une insurrection baasiste et sunnite contre l’occupation et le gouvernement irakien, qui est devenue un conflit sectaire meurtrier entre les extrémistes sunnites et chiites. Il a été estimé que 655 000 Irakiens sont morts et que plus d’un million sont des réfugiés. Le chaos à travers le pays y immobilise 140 000 soldats américains et a empêché toute tentative cohérente de développer la production du pétrole en Irak.

Khalilzad a esquissé lundi soir ce qui est un revirement tactique de la politique américaine. L’administration Bush adopte en grande partie les demandes de l’élite américaine de réaliser une entente avec les baasistes dans le but de renforcer la « stabilité ». En opposition aux plans chiites et kurdes de régionalisme inscrit dans la constitution - dans l’élaboration de laquelle Khalilzad a joué un rôle majeur -, il demande maintenant une « loi sur le pétrole qui partagera les profits des ressources de l’Irak d’une façon qui contribuera à l’unification du pays », « l’amendement de la constitution » et
« la transformation de la commission pour éradiquer le baasisme en un programme d’imputabilité et de réconciliation ».
Khalilzad définit la « réconciliation » comme « la persuasion des insurgés sunnites de déposer les armes ». Pour cela, des concessions politiques majeures doivent être offertes à l’élite sunnite, qui restaureront au moins de façon significative son pouvoir et ses privilèges. Une ouverture possible considérée dans les médias américains a été le rappel de la caste des officiers de l’ancienne armée de l’Irak qui avait été complètement dissoute et marginalisée après l’invasion américaine de 2003.
La terminologie employée par le général Casey pour décrire les « insurgés » a mis en évidence le changement qui avait lieu. Durant des années, l’armée américaine a qualifié sans discrimination tous les supporters de la résistance en Irak de « terroristes », ou les a présentés de façon absurde comme des « forces anti-irakiennes ». Toutefois, dans la nuit de mardi, Casey a fait la distinction entre les extrémistes religieux sunnites dans des organisations comme al-Qaïda, et les guérillas baasistes, qu’il a décrites comme des « insurgés qui combattent surtout contre nous et qui soutiennent être l’honorable résistance à l’occupation étrangère en Irak ».
Tout en laissant entendre qu’une amnistie serait offerte aux insurgés bassistes, Casey a clairement exprimé que les États-Unis voulaient détruire la milice chiite de l’armée du Mahdi, qui est entretenue à Bagdad et au sud de l’Irak par le mouvement du clerc anti-occupation Moqtada Al-Sadr. Ses supporters forment la plus grande faction chiite de l’actuel gouvernement du premier ministre Nouri al-Maliki. Sans directement nommer l’armée du Mahdi, il a déclaré que des « escadrons de la mort et d’autres groupes armés illégaux attaquaient et tuaient des civils » et causaient « des problèmes de sécurité dans les régions au centre et au sud du pays ».
Déclarant qu’un « effort combiné de la police et de l’armée » était nécessaire contre les milices, Casey a insisté que l’administration Bush faisait pression sur le gouvernement Maliki pour que celui-ci sanctionne des mesures répressives. Durant les deux derniers mois, plusieurs indices ont suggéré que Washington et les partis sunnites préparaient un coup d’État par des éléments de la nouvelle armée irakiennesi Maliki continuait à refuser de sanctionner un bain de sang contre l’armée du Mahdi.
Il y a une logique derrière les appels simultanés à la réconciliation avec les insurgés sunnites et à une action militaire contre l’armée du Mahdi. Le mouvement sadriste tire son appui de millions d’Irakiens chiites pauvres et de la classe ouvrière, particulièrement dans la banlieue de Bagdad de Sadr City, qui a souffert une répression brutale sous le régime de Hussein. Ils s’opposeraient farouchement à tout retour à des positions de pouvoir par des éléments de l’establishment du Parti baasiste. Une telle action ne ferait qu’amplifier l’opposition massive qui existe parmi les masses chiites contre l’occupation américaine et renforcerait la position des éléments les plus radicaux qui sont partisans de la lutte armée.
Une réconciliation avec l’insurrection sunnite négociée par les États-Unis nécessiterait l’anéantissement des milices armées chiites. Un article de la plus récente parution du magazine Time par son correspondant à Bagdad Aparisim Ghosh explique directement la conclusion à laquelle arrivent les cercles politiques et militaires américains. Rejoignant principalement ce dont Khalilzad et Casey avaient donné un aperçu, le Time a défini les moyens pour empêcher la situation en Irak « d’empirer », soit la purge des supporters des partis chiites des nouvelles forces de sécurité irakiennes, des mesures « pour s’occuper de Moqtad al-Sadr et des efforts pour « ramener les sunnites ».
En faisant référence aux sadristes, Ghosh a écrit : « En public, l’armée américaine affirme que al-Sadr, qui contrôle une section considérable au parlement, est une figure politique importante et qu’il doit être traité en conséquence... Toutefois, en privé, les commandants américains disent qu’ils voudraient ne plus être entravés juste assez longtemps pour porter quelques coups à l’armée du Mahdi. Ça ne serait pas simple : un assaut frontal sur la très populeuse Sadr City n’est pas une option intelligente... mais les États-Unis pourraient bien réussir quelque chose en frappant ces éléments de l’armée du Mahdi qui sont responsables des pires atrocités sectaires et activités criminelles ».
À la conférence de presse de Bagdad, Casey a laissé entrevoir un assaut contre Sadr City. Il a déclaré que l’objectif militaire dans la capitale était de nettoyer les quartiers d’où vient la violence sectaire alléguée et indiquait qu’il allait peut-être réquisitionner des troupes additionnelles pour ce qui se prépare à être l’opération la plus sanglante de la guerre en Irak.
Les forces d’occupation américaine envahissent déjà des résidences et bureaux des dirigeants de l’armée du Mahdi en préparation pour une offensive majeur. L’agence de presse KUNA rapportait que les troupes américaines ont défoncé lundi les bureaux de l’armée du Mahdi à Holla, la capitale de la province de Babel dans le sud de l’Irak. La même journée, la résidence d’un dirigeant de la milice dans la province de Diwaniya était perquisitionnée.
Jeudi dernier, les troupes américaines ont arrêté le commandant de l’Armée du Mahdi à Hindiya, une ville près de Karbal, et envahirent une mosquée chiite à Bagdad contrôlé par le mouvement sadriste. Au moins un Irakien a été tué dans le raid et deux autres emmenés. La détention arrive juste 24 heures après l’intervention personnelle de Maliki demandant aux militaires américains de relâcher un dirigeant sadriste en vue, Masen al-Saedi, qu’ils avaient appréhendé la semaine dernière. Ces raids pourraient très bien être des tentatives conscientes pour provoquer la branche armée des sadristes dans une confrontation ouverte pour justifier l’assaut américain.
Cependant, les implications des plans de l’administration Bush vont beaucoup plus loin que l’horrible bain de sang à Bagdad. Sinistrement, alors que Khalilzad déclarait que les Etats-Unis allaient chercher auprès des Etats arabes voisin, tel que l’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis et la Jordanie pour de l’aide, il caractérisait la Syrie et le Liban comme étant les forces « au travail pour nous empêcher et les Irakiens de réussir ».
Casey a déclaré que ces deux Etats « donnent un appui aux différents groupes extrémistes et terroristes opérant à l’intérieur de l’Irak ». Ces remarques suggèrent que l’administration Bush n’a pas encore embrassé l’appel à l’ouverture vis-à-vis la Syrie et l’Iran lancé par des personnalités tel James Baker, le dirigeant du Groupe d’Etude sur l’Irak. Sa politique demeure celle du « changement de régime » à Damas et Téhéran, en tant que partie constituante de son ambition d’étendre la domination des Etats-Unis sur les ressources et territoires du Moyen-Orient.
Le porte-parole de la Maison-Blanche, Tony Snow, a déclaré la semaine dernière que les discussions en cour sur la situation en Irak « ne changent certainement pas notre position diplomatique à l’égard de la [Syrie ou de l’Iran] ».
Pour sa part, la théocratie iranienne chiite, qui a mené un combat sanglant de huit ans contre les baasistes d’Irak, a peu d’incitation pour appuyer le programme américain à moins que des concessions majeures soient accordées par Washington sur des questions comme l’énergie nucléaire et les sanctions commerciales. Une offensive contre la milice chiite va probablement mener à l’effondrement du gouvernement irakien à dominance chiite et son remplacement par un régime hostile à Téhéran.
Le « changement de cap » de l’administration Bush, dévoilé la nuit dernière ne va pas seulement coûté la vie de milliers d’Irakiens et d’Américains, mais pourrait bien provoquer une escalade dans une région déjà très volatile.
James Cogan
C'est l'histoire d'un égaré dans une armée embourbée. L'histoire d'un jeune homme sincère et crédule, qui, aspirant à la fois à un statut, un métier, un avenir, s'est engagé dans la carrière militaire et s'est rendu compte, avec horreur, qu'il s'est fourvoyé. L'histoire d'un idéaliste, incapable de braquer une arme sur un autre homme, mais envoyé tout de même en Irak, et trop respectueux de son pays d'adoption pour imaginer déserter. L'histoire d'un soldat qui ne voulait plus l'être, et qui se retrouve aujourd'hui emprisonné, attendant un jugement de cour martiale dans une base américaine en Allemagne.L'armée américaine veut-elle faire un exemple ? Son acharnement à garder en son sein le soldat Aguayo témoigne en tout cas de son raidissement à l'égard des "rebelles" et d'une réelle inquiétude devant la perte ou la fuite de ses hommes. "Selon le Pentagone, écrit le magazine Air Force Times, ils seraient 40 000 à avoir déserté depuis l'an 2000."
L'armée, seule, évalue le nombre des déserteurs à 1,1 % des troupes. La GI Rights Hotline, qui recevait, juste après le 11 septembre 2001, un à deux appels par semaine de candidats au départ, dit en recevoir en ce moment plus de 3 000 par mois.Agustin Aguayo a 34 ans, une stature de colosse, un visage poupin et des yeux très doux. Né au Mexique, il a débarqué en Californie avec sa famille à l'âge de 3 ans et n'a eu de cesse, dès lors, que de devenir un parfait Américain. La nationalité lui a été accordée en 1998. Il était déjà marié à Helga, une jeune femme née au Guatemala, et était père de deux petites filles, des jumelles âgées aujourd'hui de 11 ans. Avant même la fin du lycée, Agustin avait un travail, et puis un autre, et encore un autre.Il était ambitieux, il voulait progresser. Il ne tirait aucune fierté d'une dizaine d'années passées à travailler dans une banque, et il enviait sa femme, qui trouvait, elle, une vraie satisfaction professionnelle auprès de malades du sida. Il voulait aider, être utile, faire quelque chose d'un peu plus grand qu'avec un emploi salarié ordinaire, donner un sens à sa vie. Il prit des cours du soir, passa un diplôme commercial, chercha fiévreusement un tremplin. L'armée le lui fournit. Le recruteur, il faut le dire, était spécialement convaincant. Primes, promesses de prêt et de bourse d'études, assurance-maladie avantageuse, formation interne (Agustin voulait être infirmier, en espérant pouvoir se payer l'école de médecine à la fin de son contrat de quatre ans de service actif). Il n'en finissait pas d'énoncer les avantages qui devaient assurer à la famille Aguayo une sécurité financière exceptionnelle. Et puis, il y avait l'argument psychologique : altruisme et défense des valeurs de la démocratie...Agustin a donc signé. Il est très vite parti pour un camp d'entraînement. C'était à la fin de l'année 2002, et la famille Aguayo n'avait jamais imaginé un déploiement en zone de combat. "Cela doit vous paraître incroyable, dit aujourd'hui Helga. Mais, comme la plupart des Américains, nous ne lisions pas les journaux ! C'est terrible, cette irresponsabilité et cette indifférence à l'égard des guerres que mène notre armée."Au camp, Agustin commence néanmoins à douter. "La première fois que j'ai tenu un M-16, j'ai été envahi par la culpabilité. Sentir le poids de cette machine à tuer m'anéantissait."Les exercices de tir sur des silhouettes à forme humaine ou le poignardage de mannequins le rendent malade. Sa place était-elle dans l'armée ? A l'annonce du déclenchement de la guerre en Irak, en mars 2003, il est stupéfait d'apprendre que même les infirmiers doivent être armés et obéir à l'ordre de tuer.Trois mois plus tard, il part en Allemagne. C'est là, à Schweinfurt, qu'est stationnée son unité de la 1re division d'infanterie. Environ 67 000 soldats américains et quelque 80 000 membres de leurs familles se répartissent outre-Rhin sur 73 campements, bases arrière pour le déploiement au Moyen-Orient. Malgré l'arrivée de sa femme et de ses filles, Agustin se sent pris au piège. Il ne veut pas combattre, il ne veut pas tuer, il est contre la guerre, toutes les guerres, jamais il ne lèvera son arme contre quiconque. Inquiète du malaise croissant de son mari, Helga cherche désespérément une aide, une idée, une issue.Elle tape, sur Google, des phrases comme "quitter l'armée", ou "refus d'aller en Irak". Elle trouve les coordonnées de la GI Rights Hotline en Californie, une ligne téléphonique gérée par plusieurs organisations pacifistes. Et, par ricochet, le contact de MCN (Military Counceling Network), un organisme lié à l'Eglise mémonite, et entièrement voué aux conseils à destination des soldats basés en Allemagne voulant quitter l'armée par des moyens légaux. Les Aguayo, dès lors, ne sont plus seuls.L'objection de conscience, reconnue au sein même de l'armée, apparaît immédiatement comme la position la plus adéquate pour obtenir l'élargissement d'Agustin. Mais la procédure est exigeante. Le soldat doit démontrer qu'il est opposé à toutes les guerres, notamment en vertu d'une forte conviction religieuse ; expliquer ses motifs profonds, les raisons de son changement. Il doit s'entretenir longuement avec un aumônier militaire, un psychiatre et un enquêteur de l'armée, lequel fera un rapport au commandant, qui délivrera son verdict."C'est la voie la plus difficile pour sortir de l'armée, estime Michael Sharp, jeune juriste bénévole qui dirige le bureau MCN près d'Heidelberg. Il faut une totale sincérité et beaucoup de courage. Car ce n'est pas le meilleur moyen de se faire des amis ! Il est arrivé que des candidats soient harcelés, battus, violés. On les humilie, on les traite de lâches, on leur réserve les corvées. Ils remettent en question l'armée, c'est donc tout leur environnement quotidien qui devient hostile. Franchement, si l'on veut juste se défiler, il y a plus simple : la désertion, l'absorption de drogues en espérant être pris, la fausse revendication d'une homosexualité..."Mais Agustin ne songe pas une seconde à mentir et veut une dispense dite "honorable" de l'armée. Si le nombre de soldats requérant le statut d'objecteur a plus que quadruplé depuis 2000, il demeure très réduit. Sur plusieurs centaines de candidats potentiels, 188 auraient réellement déposé une demande entre 2003 et 2005 ; 87 auraient obtenu satisfaction.Un chiffre qui ne dit rien des demandes préalablement déposées devant un commandant dissuasif, des fiches perdues par l'administration, des mesures de rétorsion. "Il faut parfaitement connaître ses droits, affirme Michael Sharp, menacer d'interpeller un membre du Congrès, réitérer sa demande..."De fait, le commandant de son unité refuse de jeter ne serait-ce qu'un oeil sur le dossier que prépare Agustin. "Vous le ferez en Irak !", lui dit-il. Et le soldat s'envole en février 2004 pour Tikrit, la ville natale de Saddam Hussein, ignorant qu'une demande de statut d'objecteur formulée sur une zone de guerre attire beaucoup plus de suspicion. Il ne perd pourtant pas un instant. L'aumônier et le psychiatre avec lesquels il s'entretient concluent à sa sincérité, et l'officier enquêteur, impressionné par les témoignages sur son pacifisme, recommande l'élargissement. En attendant la réponse, l'infirmier remplit sa tâche, effaré.Des soldats, des Irakiens meurent dans ses bras. "J'ai vu des hommes revenir avec des membres en moins et des plaies innombrables, physiques et morales. J'ai vu mes camarades revenir avec l'intention de se suicider, de boire à mort ou de se perdre dans la drogue... J'ai été témoin de notre façon de déshumaniser le peuple irakien et d'exterminer des innocents. Quel non-sens ! Ma conviction de l'absurdité et de la nocivité de toutes les guerres n'a fait que se renforcer." Quand Agustin part en patrouille ou prend ses tours de garde, il ne charge pas son arme. Ses camarades n'en croient pas leurs yeux. "Comment douter de la sincérité d'un gars assez fou pour faire cela en Irak ?", s'étonne Michael Sharp.Pourtant, fin août 2004, la hiérarchie militaire refuse à Agustin le statut d'objecteur. Le coup est terrible. "En me disant : non, vous n'êtes pas un objecteur à la guerre, ils niaient ma conscience. C'était comme dire à quelqu'un : tu n'es pas catholique. Ou tu n'es pas juif." Sa femme et plusieurs organisations pacifistes entreprennent une grande campagne de mobilisation de fonds pour lui offrir l'aide d'avocats et porter l'affaire devant une juridiction civile.A son retour en Allemagne, après une année d'Irak, Agustin reprend donc espoir. L'armée accepte de revoir son cas. Hélas, pour lui, la première décision est confirmée. Les avocats se tournent alors vers le tribunal civil du district de Columbia pour casser le verdict de l'armée. En vain. Agustin apprend son échec le 24 août 2006, le jour même où l'armée lui oppose également l'article 15, une sanction sévère consistant en une amende et une prolongation de service pour avoir refusé de tenir une arme durant les entraînements.Ses avocats font appel devant la cour fédérale, mais n'obtiennent pas que l'appel soit suspensif, alors qu'un nouveau déploiement en Irak est fixé au 1er septembre. Un départ pour au moins un an puisque, en vertu de la disposition "Stop loss" ("Arrêter les pertes", décidée par le gouvernement après le 11-Septembre), qui autorise l'armée à étendre unilatéralement le temps de service d'un soldat, Agustin voit son service prolongé d'un an ! "En Europe, estime Christian Rieker, l'avocat allemand d'Agustin, cette pratique serait considérée comme une violation des droits de l'homme. Quelle hypocrisie de parler d'une armée strictement composée de volontaires !" Désespéré, Agustin annonce à ses supérieurs qu'en aucun cas il ne partira à la guerre.Le 1er septembre, alors que son unité prend un bus pour rejoindre l'avion en partance pour l'Irak, il manque à l'appel. Le lendemain, habillé en civil, il se présente à la police militaire afin de se constituer prisonnier et passer en cour martiale. Mais l'armée ne l'entend pas ainsi, elle veut lui faire prendre un autre vol pour l'Irak.Agustin n'en croit pas ses oreilles. "Tu es soldat, tu entends ?, hurle un capitaine. Tu iras en Irak !" Jamais, répond Agustin. On lui ordonne de passer chez lui prendre son paquetage. Un capitaine et un sergent l'accompagnent. "Tu partiras ! Même s'il faut te mettre les menottes !" Les voilà dans son salon, attendant qu'il rassemble ses affaires dans sa chambre.Au bout de quinze minutes, le capitaine s'impatiente. Que diable fait-il ? Helga va voir. La fenêtre de la chambre est grande ouverte. "Il est parti !", crie-t-elle. Les soldats se précipitent, fouillent l'appartement, foncent à l'extérieur. Trop tard. Agustin a sauté et couru, couru comme un fou vers la sortie du camp. Les gardiens qui l'ont vu passer en trombe n'ont même pas eu le temps de comprendre. Il avait disparu.Où pouvait-il se réfugier ? "Les pays européens, si prompts à déclarer illégale la guerre en Irak, feraient bien d'accueillir ceux qui refusent de combattre !, soupire Christian Rieker. Où sont la France, l'Espagne, l'Allemagne pour de pauvres gars comme Agustin ? Pourquoi n'accorde-t-on pas aux objecteurs et déserteurs le statut de réfugiés, comme l'ont d'ailleurs proposé des députés du Parlement européen dans un projet de résolution ?" Agustin avait heureusement des soutiens. Des civils l'ont aidé, caché, habillé, lui ont procuré passeport et billet d'avion pour... Mexico. De là, il est passé discrètement en Californie. Où il est publiquement réapparu le 26 septembre.Pourquoi vingt-quatre jours après sa disparition et pas trente ? Parce qu'il aurait alors été rayé des listes de l'armée et qualifié de déserteur. Un statut qu'Agustin, si soucieux de rester dans le cadre du règlement militaire, a toujours rejeté. Le 26 septembre, donc, cravaté, solennel, il fait son apparition devant une petite église de Los Angeles et annonce qu'il veut se rendre. "J'ai toujours été un bon citoyen. Jamais je n'aurais imaginé arriver à cette extrémité. Les conséquences pour moi et ma famille vont être très lourdes. Mais j'assume ma position d'objecteur, je préfère la prison à la guerre." Après une courte déclaration, il s'est rendu à Fort Irving, là même où il s'était engagé quatre ans plus tôt.Allait-il passer là en cour martiale, comme l'espéraient ses avocats ? Ou serait-il transféré en Allemagne, voire au Koweït ou en Irak, comme certains le suggéraient ? Au petit matin du 3 octobre, en uniforme, les menottes cachées par un manteau, il débarque à l'aéroport de Francfort entouré de soldats de son unité qui étaient allés le chercher et prend la direction de la base de Mannheim, où il est actuellement incarcéré."Son unité, qui se bat en Irak dans des conditions effroyables, a besoin de chaque homme, affirme le major Wayne Marotto, porte-parole de la 1re division. Il y a eu des morts au combat, beaucoup de blessés. La désertion d'un infirmier fait courir un risque à tous les soldats. Aucune armée de volontaires ne peut accepter la défaillance d'un de ses hommes. Déserter est un crime qui, en temps de guerre, est encore passible de la peine de mort. Au commandant de son unité de décider de son sort."Tandis que des milliers de déserteurs se cachent aux Etats-Unis, que plusieurs centaines ont fui au Canada, Agustin Aguayo, le pacifique, risque en Allemagne plusieurs années de prison.Annick Cojeanhttp://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3230,36-829014,0.html
LE MONDE 30.10.06 14h11
Article original anglais paru le 25 octobre 2006
Source : WSWS http://www.wsws.org/
4 Courrier des lecteurs & trouvé sur le net
4-1 Dossier de Annick Cojean : "Soldat ! Tu iras en Irak".
C'est l'histoire d'un égaré dans une armée embourbée. L'histoire d'un jeune homme sincère et crédule, qui, aspirant à la fois à un statut, un métier, un avenir, s'est engagé dans la carrière militaire et s'est rendu compte, avec horreur, qu'il s'est fourvoyé. L'histoire d'un idéaliste, incapable de braquer une arme sur un autre homme, mais envoyé tout de même en Irak, et trop respectueux de son pays d'adoption pour imaginer déserter. L'histoire d'un soldat qui ne voulait plus l'être, et qui se retrouve aujourd'hui emprisonné, attendant un jugement de cour martiale dans une base américaine en Allemagne.L'armée américaine veut-elle faire un exemple ? Son acharnement à garder en son sein le soldat Aguayo témoigne en tout cas de son raidissement à l'égard des "rebelles" et d'une réelle inquiétude devant la perte ou la fuite de ses hommes. "Selon le Pentagone, écrit le magazine Air Force Times, ils seraient 40 000 à avoir déserté depuis l'an 2000."
L'armée, seule, évalue le nombre des déserteurs à 1,1 % des troupes. La GI Rights Hotline, qui recevait, juste après le 11 septembre 2001, un à deux appels par semaine de candidats au départ, dit en recevoir en ce moment plus de 3 000 par mois.Agustin Aguayo a 34 ans, une stature de colosse, un visage poupin et des yeux très doux. Né au Mexique, il a débarqué en Californie avec sa famille à l'âge de 3 ans et n'a eu de cesse, dès lors, que de devenir un parfait Américain. La nationalité lui a été accordée en 1998. Il était déjà marié à Helga, une jeune femme née au Guatemala, et était père de deux petites filles, des jumelles âgées aujourd'hui de 11 ans. Avant même la fin du lycée, Agustin avait un travail, et puis un autre, et encore un autre.Il était ambitieux, il voulait progresser. Il ne tirait aucune fierté d'une dizaine d'années passées à travailler dans une banque, et il enviait sa femme, qui trouvait, elle, une vraie satisfaction professionnelle auprès de malades du sida. Il voulait aider, être utile, faire quelque chose d'un peu plus grand qu'avec un emploi salarié ordinaire, donner un sens à sa vie. Il prit des cours du soir, passa un diplôme commercial, chercha fiévreusement un tremplin. L'armée le lui fournit. Le recruteur, il faut le dire, était spécialement convaincant. Primes, promesses de prêt et de bourse d'études, assurance-maladie avantageuse, formation interne (Agustin voulait être infirmier, en espérant pouvoir se payer l'école de médecine à la fin de son contrat de quatre ans de service actif). Il n'en finissait pas d'énoncer les avantages qui devaient assurer à la famille Aguayo une sécurité financière exceptionnelle. Et puis, il y avait l'argument psychologique : altruisme et défense des valeurs de la démocratie...Agustin a donc signé. Il est très vite parti pour un camp d'entraînement. C'était à la fin de l'année 2002, et la famille Aguayo n'avait jamais imaginé un déploiement en zone de combat. "Cela doit vous paraître incroyable, dit aujourd'hui Helga. Mais, comme la plupart des Américains, nous ne lisions pas les journaux ! C'est terrible, cette irresponsabilité et cette indifférence à l'égard des guerres que mène notre armée."Au camp, Agustin commence néanmoins à douter. "La première fois que j'ai tenu un M-16, j'ai été envahi par la culpabilité. Sentir le poids de cette machine à tuer m'anéantissait."Les exercices de tir sur des silhouettes à forme humaine ou le poignardage de mannequins le rendent malade. Sa place était-elle dans l'armée ? A l'annonce du déclenchement de la guerre en Irak, en mars 2003, il est stupéfait d'apprendre que même les infirmiers doivent être armés et obéir à l'ordre de tuer.Trois mois plus tard, il part en Allemagne. C'est là, à Schweinfurt, qu'est stationnée son unité de la 1re division d'infanterie. Environ 67 000 soldats américains et quelque 80 000 membres de leurs familles se répartissent outre-Rhin sur 73 campements, bases arrière pour le déploiement au Moyen-Orient. Malgré l'arrivée de sa femme et de ses filles, Agustin se sent pris au piège. Il ne veut pas combattre, il ne veut pas tuer, il est contre la guerre, toutes les guerres, jamais il ne lèvera son arme contre quiconque. Inquiète du malaise croissant de son mari, Helga cherche désespérément une aide, une idée, une issue.Elle tape, sur Google, des phrases comme "quitter l'armée", ou "refus d'aller en Irak". Elle trouve les coordonnées de la GI Rights Hotline en Californie, une ligne téléphonique gérée par plusieurs organisations pacifistes. Et, par ricochet, le contact de MCN (Military Counceling Network), un organisme lié à l'Eglise mémonite, et entièrement voué aux conseils à destination des soldats basés en Allemagne voulant quitter l'armée par des moyens légaux. Les Aguayo, dès lors, ne sont plus seuls.L'objection de conscience, reconnue au sein même de l'armée, apparaît immédiatement comme la position la plus adéquate pour obtenir l'élargissement d'Agustin. Mais la procédure est exigeante. Le soldat doit démontrer qu'il est opposé à toutes les guerres, notamment en vertu d'une forte conviction religieuse ; expliquer ses motifs profonds, les raisons de son changement. Il doit s'entretenir longuement avec un aumônier militaire, un psychiatre et un enquêteur de l'armée, lequel fera un rapport au commandant, qui délivrera son verdict."C'est la voie la plus difficile pour sortir de l'armée, estime Michael Sharp, jeune juriste bénévole qui dirige le bureau MCN près d'Heidelberg. Il faut une totale sincérité et beaucoup de courage. Car ce n'est pas le meilleur moyen de se faire des amis ! Il est arrivé que des candidats soient harcelés, battus, violés. On les humilie, on les traite de lâches, on leur réserve les corvées. Ils remettent en question l'armée, c'est donc tout leur environnement quotidien qui devient hostile. Franchement, si l'on veut juste se défiler, il y a plus simple : la désertion, l'absorption de drogues en espérant être pris, la fausse revendication d'une homosexualité..."Mais Agustin ne songe pas une seconde à mentir et veut une dispense dite "honorable" de l'armée. Si le nombre de soldats requérant le statut d'objecteur a plus que quadruplé depuis 2000, il demeure très réduit. Sur plusieurs centaines de candidats potentiels, 188 auraient réellement déposé une demande entre 2003 et 2005 ; 87 auraient obtenu satisfaction.Un chiffre qui ne dit rien des demandes préalablement déposées devant un commandant dissuasif, des fiches perdues par l'administration, des mesures de rétorsion. "Il faut parfaitement connaître ses droits, affirme Michael Sharp, menacer d'interpeller un membre du Congrès, réitérer sa demande..."De fait, le commandant de son unité refuse de jeter ne serait-ce qu'un oeil sur le dossier que prépare Agustin. "Vous le ferez en Irak !", lui dit-il. Et le soldat s'envole en février 2004 pour Tikrit, la ville natale de Saddam Hussein, ignorant qu'une demande de statut d'objecteur formulée sur une zone de guerre attire beaucoup plus de suspicion. Il ne perd pourtant pas un instant. L'aumônier et le psychiatre avec lesquels il s'entretient concluent à sa sincérité, et l'officier enquêteur, impressionné par les témoignages sur son pacifisme, recommande l'élargissement. En attendant la réponse, l'infirmier remplit sa tâche, effaré.Des soldats, des Irakiens meurent dans ses bras. "J'ai vu des hommes revenir avec des membres en moins et des plaies innombrables, physiques et morales. J'ai vu mes camarades revenir avec l'intention de se suicider, de boire à mort ou de se perdre dans la drogue... J'ai été témoin de notre façon de déshumaniser le peuple irakien et d'exterminer des innocents. Quel non-sens ! Ma conviction de l'absurdité et de la nocivité de toutes les guerres n'a fait que se renforcer." Quand Agustin part en patrouille ou prend ses tours de garde, il ne charge pas son arme. Ses camarades n'en croient pas leurs yeux. "Comment douter de la sincérité d'un gars assez fou pour faire cela en Irak ?", s'étonne Michael Sharp.Pourtant, fin août 2004, la hiérarchie militaire refuse à Agustin le statut d'objecteur. Le coup est terrible. "En me disant : non, vous n'êtes pas un objecteur à la guerre, ils niaient ma conscience. C'était comme dire à quelqu'un : tu n'es pas catholique. Ou tu n'es pas juif." Sa femme et plusieurs organisations pacifistes entreprennent une grande campagne de mobilisation de fonds pour lui offrir l'aide d'avocats et porter l'affaire devant une juridiction civile.A son retour en Allemagne, après une année d'Irak, Agustin reprend donc espoir. L'armée accepte de revoir son cas. Hélas, pour lui, la première décision est confirmée. Les avocats se tournent alors vers le tribunal civil du district de Columbia pour casser le verdict de l'armée. En vain. Agustin apprend son échec le 24 août 2006, le jour même où l'armée lui oppose également l'article 15, une sanction sévère consistant en une amende et une prolongation de service pour avoir refusé de tenir une arme durant les entraînements.Ses avocats font appel devant la cour fédérale, mais n'obtiennent pas que l'appel soit suspensif, alors qu'un nouveau déploiement en Irak est fixé au 1er septembre. Un départ pour au moins un an puisque, en vertu de la disposition "Stop loss" ("Arrêter les pertes", décidée par le gouvernement après le 11-Septembre), qui autorise l'armée à étendre unilatéralement le temps de service d'un soldat, Agustin voit son service prolongé d'un an ! "En Europe, estime Christian Rieker, l'avocat allemand d'Agustin, cette pratique serait considérée comme une violation des droits de l'homme. Quelle hypocrisie de parler d'une armée strictement composée de volontaires !" Désespéré, Agustin annonce à ses supérieurs qu'en aucun cas il ne partira à la guerre.Le 1er septembre, alors que son unité prend un bus pour rejoindre l'avion en partance pour l'Irak, il manque à l'appel. Le lendemain, habillé en civil, il se présente à la police militaire afin de se constituer prisonnier et passer en cour martiale. Mais l'armée ne l'entend pas ainsi, elle veut lui faire prendre un autre vol pour l'Irak.Agustin n'en croit pas ses oreilles. "Tu es soldat, tu entends ?, hurle un capitaine. Tu iras en Irak !" Jamais, répond Agustin. On lui ordonne de passer chez lui prendre son paquetage. Un capitaine et un sergent l'accompagnent. "Tu partiras ! Même s'il faut te mettre les menottes !" Les voilà dans son salon, attendant qu'il rassemble ses affaires dans sa chambre.Au bout de quinze minutes, le capitaine s'impatiente. Que diable fait-il ? Helga va voir. La fenêtre de la chambre est grande ouverte. "Il est parti !", crie-t-elle. Les soldats se précipitent, fouillent l'appartement, foncent à l'extérieur. Trop tard. Agustin a sauté et couru, couru comme un fou vers la sortie du camp. Les gardiens qui l'ont vu passer en trombe n'ont même pas eu le temps de comprendre. Il avait disparu.Où pouvait-il se réfugier ? "Les pays européens, si prompts à déclarer illégale la guerre en Irak, feraient bien d'accueillir ceux qui refusent de combattre !, soupire Christian Rieker. Où sont la France, l'Espagne, l'Allemagne pour de pauvres gars comme Agustin ? Pourquoi n'accorde-t-on pas aux objecteurs et déserteurs le statut de réfugiés, comme l'ont d'ailleurs proposé des députés du Parlement européen dans un projet de résolution ?" Agustin avait heureusement des soutiens. Des civils l'ont aidé, caché, habillé, lui ont procuré passeport et billet d'avion pour... Mexico. De là, il est passé discrètement en Californie. Où il est publiquement réapparu le 26 septembre.Pourquoi vingt-quatre jours après sa disparition et pas trente ? Parce qu'il aurait alors été rayé des listes de l'armée et qualifié de déserteur. Un statut qu'Agustin, si soucieux de rester dans le cadre du règlement militaire, a toujours rejeté. Le 26 septembre, donc, cravaté, solennel, il fait son apparition devant une petite église de Los Angeles et annonce qu'il veut se rendre. "J'ai toujours été un bon citoyen. Jamais je n'aurais imaginé arriver à cette extrémité. Les conséquences pour moi et ma famille vont être très lourdes. Mais j'assume ma position d'objecteur, je préfère la prison à la guerre." Après une courte déclaration, il s'est rendu à Fort Irving, là même où il s'était engagé quatre ans plus tôt.Allait-il passer là en cour martiale, comme l'espéraient ses avocats ? Ou serait-il transféré en Allemagne, voire au Koweït ou en Irak, comme certains le suggéraient ? Au petit matin du 3 octobre, en uniforme, les menottes cachées par un manteau, il débarque à l'aéroport de Francfort entouré de soldats de son unité qui étaient allés le chercher et prend la direction de la base de Mannheim, où il est actuellement incarcéré."Son unité, qui se bat en Irak dans des conditions effroyables, a besoin de chaque homme, affirme le major Wayne Marotto, porte-parole de la 1re division. Il y a eu des morts au combat, beaucoup de blessés. La désertion d'un infirmier fait courir un risque à tous les soldats. Aucune armée de volontaires ne peut accepter la défaillance d'un de ses hommes. Déserter est un crime qui, en temps de guerre, est encore passible de la peine de mort. Au commandant de son unité de décider de son sort."Tandis que des milliers de déserteurs se cachent aux Etats-Unis, que plusieurs centaines ont fui au Canada, Agustin Aguayo, le pacifique, risque en Allemagne plusieurs années de prison.Annick Cojeanhttp://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3230,36-829014,0.html
LE MONDE 30.10.06 14h11